Le Deal du moment : -45%
PC Portable LG Gram 17″ Intel Evo Core i7 32 Go ...
Voir le deal
1099.99 €

Page 5 sur 5 Précédent  1, 2, 3, 4, 5

Lun 28 Oct 2019 - 18:37

Anonymous
Invité

Invité


How Far I'll Go


La hauteur nous attire, mais non les degrés qui y mènent;
Les yeux fixés sur la Lune, nous cheminons volontiers dans la plaine
~Goethe





Le regard innocemment posté sur l’écriture de Servis, elle observait la plume chatouiller le papier en y laissant son empreinte indélébile, du moins bien plus inaltérable que le fusain. Mais également moins grossière, plus élégante et infiniment plus difficile à déchiffrer pour Sahren. En en réalité, elle ne reconnaissait que certaines lettres évidentes, tandis que d’autres lui semblaient totalement identiques.
Les yeux rivés sur le papier, elle prenait conscience soudainement du fossé qui la séparait de l’homme. Lui, le lettré, le mage raffiné, intelligent, conscient de tout ce qui l’entourait, analysant son environnement avec les yeux d’un rapace. Et elle, l’elfe, la femme, la servante, l’éclaireuse inculte. A cet instant, en constatant l’abîme qui les séparait, elle souhaita plus que tout au monde être née de l’autre côté de la barrière. Du côté des forts, des nantis, des puissants. Ceux qui détenaient la richesse, la connaissance ou le pouvoir. Mais elle, démunie de tout, n’était qu’un pion dans leur échiquier.

Plongée dans ses pensées, elle ne réalisa pas que le temps autour d’elle suivait son cours, elle ne sentait plus le vent nocturne du désert s’infiltrer dans ses manches et glacer sa peau. Ce fut Servis qui la ramena à elle même, au moment où il se leva, juste après avoir fait disparaître son morceau de papier et sa plume.
Elle l’écouta lui parler du lyrium rouge tout d’abord, combien il n’était pas naturel mais également dangereux. Même si sa concentration était optimale, elle sursauta légèrement lorsqu’il prononça son nom et elle réalisa qu’elle ne le regardait pas. Alors elle planta ses yeux d’un vert électrique ceux céruléens du mage, canalisant sur lui son attention.
Il lui parla des effets du lyrium sur son propre comportement, sur sa paranoïa notamment et immédiatement, elle se remémora la pointe de son bâton qu’il avait braquée sur elle alors qu’elle avait proposé de négocier à l’extérieur de la grotte. Elle acquiesça avec solennité aux paroles de Servis, montrant qu’elle voyait très bien de quoi il voulait parler.

« C’est donc pour cela que vous sembliez… Plus agressif. » Elle détourna un instant le regard, par habitude, avant de le fixer à nouveau. « Moi aussi, je me suis sentie... bizarre. J’avais du mal à respirer avant l’attaque du varghest. »  Et je croyais aussi que j’aurais du vous laisser seul, de peur que vous vous retourniez contre moi pensa t-elle pour elle même. Elle se garda bien de lui avouer qu’elle avait craint un instant sa magie, chose qui ne lui était jamais arrivée auparavant et que son instinct lui avait dicté de prendre les jambes à son cou.

Il se redressa, avant de conclure sur la nocivité du lyrium et son caractère toxique et alors qu’il se pencha pour ramasser son casque, elle lui dit simplement :

« Merci beaucoup pour ces explications. »

Mais en réalité, elle bouillait d’envie d’en savoir plus encore, de comprendre pourquoi cette substance si horrible pouvait bien être aussi convoitée, qui donc en profitait ? Qui avait eût l’idée de s’en servir ?
Ces questions, elle n’osa pas les adresser au mage, qui l’effrayait encore un peu, même sans lyrium rouge dans les parages.  

Codage par Libella sur Graphiorum

Lun 28 Oct 2019 - 22:06

Anonymous
Invité

Invité


How far I'll go.


Crassius écouta avec attention Sahren lui détailler son propre malaise en lien avec son exposition brève au lyrium rouge. Sa révélation ne l'étonna pas : par nature les elfes étaient plus liés à l'immatériel que les humains. C'était d'ailleurs pour cette raison que certains de ces concitoyens tévintides tenaient absolument à posséder une majorité d'esclaves elfes. Ces sujets répondaient mieux aux expériences pratiquées par ces chercheurs à la déontologie plus que douteuse. Possession, magie du sang, ... Il restait malheureusement encore beaucoup de choses à découvrir sur une majorité de ces champs d'études. En choisissant d'étudier le passé, Crassius pouvait au moins se targuer de ne faire du mal à personne. Enfin, s'il parvenait à parfaitement mettre de côté l'étiquette venatori qui lui collait à la peau et qui justifiait sa présence dans le désert.

Bien qu'il n'adhérait pas à la plupart des idées des venatori, Crassius n'en portait pas moins le même uniforme. Leurs actions étaient les siennes. Ses fautes. Il ne pouvait se le cacher. Mais depuis sa position, il tâchait du mieux possible de faire respecter la loi du moindre mal. Oui, il y aurait des morts, mais ils étaient en guerre. Il n'attaquait que pour se défendre. Défendre ses exploitations. Défendre sa propre vie. Crassius était un homme très terre à terre, et contrairement à Corypheus, leur leader véritable, il ne se prenait pas pour un dieu. Il ne s'octroyait aucun droit de vie ou de mort sur quiconque. Enfin, à part sur ses propres hommes évidemment, mais là encore il ne s'agissait que de techniques managériales, rien de plus...
“Je suis heureux de constater que tes séquelles, tout comme les miennes, n'en ont été que temporaires.„

Il la regardait droit dans les yeux. Elle en revanche semblait avoir du mal à soutenir son regard. Un reste de soumission ? Avait-elle été servante dans une précédente vie ? Crassius secoua doucement la tête. *La roue tourne. Un jour, nous sommes tous les servants de quelqu'un d'autre.* Un point de vue qui, une fois encore, n'était pas pleinement répandu au sein de ses condisciples. Un sentiment que Crassius ne partageait jamais à haute voix. Il se considérait comme un être profondément indépendant, et se doutait bien qu'une telle vue d'esprit lui avait été dictée par son besoin de solitude.

Le vent se leva, créant un petit tourbillon de sable au cœur de leur abri de roche. L'air froid ne pouvait pas l'atteindre : il était bien trop protégé par ses diverses couches de tissu, de cuir et d'acier. L'elfe en revanche n'était pas aussi bien vêtu. Il était temps pour eux de se séparer. Pourtant Crassius hésita. Il lui avait été agréable de discuter ainsi de choses et d'autres. De bien peu de choses en réalité, mais tout de même : ils ignoraient presque tout l'un de l'autre, et n'attendaient rien d'un point de vue personnel de leur rencontre. Le mage se mit presque involontairement à regretter la nouvelle apparition d'un varghest mal luné. De n'importe quoi qui puisse justifier d'étendre encore quelque peu cette rencontre sous les étoiles. Mais il allait lui falloir rentrer. Il allait devoir repositionner son masque sur son visage, et préparer à l'insu de tous la cargaison promise aux Caraduplas.

“Bien Sahren. Ce fut un plaisir, vraiment. Je te souhaite un bon retour. Et qui sait ? Peut-être nous reverrons nous ?„

Crassius lui tendit alors sa main gantée. Il lui sourit franchement tout en s’inclinant quelque peu. Dès les prochaines lueurs de l'aube, Crassius s'effacerait de nouveau pour faire place à Servis. Et Servis oublierait bien vite cette rencontre, happé par la vie dans le désert, par la réalité des conflits qui l’entouraient, et par l'appât de son propre opportunisme toujours grandissant.

Mar 29 Oct 2019 - 20:47

Anonymous
Invité

Invité


How Far I'll Go


Tous les matins du monde sont sans retour. ~Pascal Quignard


L’esprit davantage éclairé par cette conversation, Sahren se félicitait intérieurement d’avoir été à l’écoute de son instinct : jamais elle ne s’était approchée du lyrium d’un peu trop près et jamais elle ne le ferai. Mais ces premières informations furent escortées par les premiers soupçons que l’elfe nourrissait vis à vis de ce trafic dans lequel elle s’était vue entraînée. Si elle ne doutait pas de la bonne foi du mage, elle imaginait cependant qu’il passait - volontairement ou non - certain aspects sous silence. Sinon, à quoi cette substance, qu’il décrivait comme le pire des poisons, pouvait bien servir ? Qui s’en procurait et à quelles fins ? Elle eût soudain l’impression d’avoir sauté à pieds joints dans un trou béant, sans fin, qui se refermait sur elle.
Elle se sentit brusquement pâlir sous sa peau mate, qui heureusement se mêlait à la lueur de la nuit et rendait imperceptible ce genre de détail. Elle entendit à peine la voix de Servis, qui lui parut tout d’un coup bien lointaine. Ses prunelles émeraude le fixait sans le voir, par habitude, mais aussi muent par un instinct humain presque automatique. Ce fut la seconde phrase de l’homme qui la ramena à sa condition de l’instant présent : celle d’une éclaireuse pour le compte d’un groupe de trafiquants de lyrium rouge.

« Bien Sahren. Ce fut un plaisir, vraiment. Je te souhaite un bon retour. Et qui sait ? Peut-être nous reverrons nous ? »
Il lui tendit une main gantée, qu’elle sera chaleureusement et fébrilement à la fois, plaçant sur son visage le mensonge de son premier sourire.
« J’en serai enchantée. Merci pour tout, Ser ! »

Elle s’attendait à ce qu’il reparte dans la direction de la mine, alors elle obliqua dans le sens opposé. Elle fit quelques pas, le regard hagard, comprenant soudain à quoi elle était liée, dans quel mazout elle était engluée.
Elle continuait de marcher, et lorsqu’elle fut certaine d’être bien seule, elle s’interrompit au milieu du désert, les poings serrés et les bras tombant fermement de chaque côté de son corps trop svelte.
Et le temps qui s’écoulait en silence résonnait en elle comme un écho creux. Elle demeura un instant sourde aux bruits environnants, malgré ses sens en exergues qui faisaient ployer son attention vers un seul, tout petit et minuscule parasite, à l’appétit gargantuesque : la culpabilité.
Il fallait à certaines personnes un certain temps pour réaliser l’immoralité insoupçonnée de leurs actions. Souvent, cela passait tout d’abord par une phase de déni ou de refus énergique, comme si la force de cette négation était proportionnelle à l’aune de leurs méfaits.
Et Sahren se retrouvait comme frappée de plein fouet par une porte qui se refermait brusquement sur son visage et son égo, tandis que pointait au loin les premiers rayons de l’aube.


Codage par Libella sur Graphiorum
Contenu sponsorisé


Page 5 sur 5 Précédent  1, 2, 3, 4, 5

Permission de ce forum:

Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum