[Event | Terminé] L'appel de l'héroïne - Le Serment des Sacrifiés

Ma technique avait visiblement fonctionné : la voilà à vouloir m’étriper, mais au fond elle savait que je marquais des points. Après tout, il n’y avait que la vérité qui faisait mal, mais qui touchait réellement les gens. Je dus retenir un petit rire quand elle tenta de me bousculer volontairement pour s’en aller ailleurs. Parfait, elle aurait de quoi mijoter. Je ne m’attardai pas plus que cela sur son départ si dramatique, savourant mon vin dans le plus grand des calmes.

Balayant la foule du regard à nouveau, il me fallait trouver le prochain à convaincre. Il en restait deux en sommes : le bann Viktor, et le plus compliqué, le Iarl Gell. Je me doutais de reconnaître le premier d’abord, de par la description particulière de son physique : grand, imposant. Il devait donc avoir la tête qui dépassait un peu au cœur des foules, contrairement à l’autre.

Me mouvant avec lenteur et souplesse au cœur de cette soirée, je cherchais le grand et fort blond des yeux, mais il semblerait qu’il me trouvât avant moi : je sentis un bras costaud s’enrouler autour du mien, avant de me traîner dans un coin plus reculé. D’abord surpris, je compris rapidement de qui il s’agissait, grand, blond et musculeux. Je me laissai entraîner dans son élan sans broncher, gardant à l’esprit que malgré le spécimen, ce n’était pas l’heure de jouer aux batifolages. Ce qui était dommage en soi.

Une fois arrêtés et à l’écart, Viktor lâcha mon bras en s’excusant vis-à-vis de son comportement.

◊ Excusez mon comportement. Mais j’avais besoin d’une excuse pour quitter ces politicards.

De par sa façon de s’exprimer, la politique était loin de l’enchanter : parfait, autant discuter de la chose de façon totalement banale, ce qui serait un défi en soi. Après tout, participer à cette bataille impliquait forcément de la politique, mais par chance, ce n’était pas le seul aspect qui rentrait en jeu. Il rit de bon cœur, sûrement pour se détendre, tandis que je haussai des épaules, souriant, avant de répondre.

◊ Ne vous en faites pas, je vous cherchais justement pour tout dire.
◊ J’imagine que vous êtes là pour recruter, hm ?

Mon rictus s’élargit : charmant, entraînant et en plus direct, quel somptueux alignement. Je savourai le fond de mon vin, avant de poursuivre sur un ton des plus enjoués.

◊ Quelle clairvoyance, au moins je n’aurai pas à me perdre en tournure avec vous, cela me rassure.

Après la discussion enflammée avec Lydia, quelque chose de plus terre à terre et de posé me ferait le plus grand bien, particulièrement quand on songeait au dernier candidat à convaincre. Après, si la conversation allait de bon train, je pourrais lui demander des informations sur comment convaincre le Iarl, voire lui demander de m’accompagner pour la forme ? Une possibilité qui serait fortement la bienvenue, pour tout dire.

◊ J’imagine que l’on vous a déjà mis au parfum sur l’idée d’une attaque que nous allons mener sur les terres du Iarl Gallagher, mais pas concrètement la stratégie derrière. Eh bien c’est fort simple, pour tout dire : l’objectif est d’atteindre les nids d’engeances et de les exterminer, afin de se débarrasser une bonne fois pour toute de leur présence sur ses terres. Une fois fait, il sera plus simple de faire le ménage.

Je marquai une première pause, laissant mon introduction reposer le contexte dans sa tête. Puis, sur un ton nonchalant, je poursuivis mes explications.

◊ Evidemment, nous serons épaulés par la Garde des Ombres, qui eux sont immunisés face aux engeances, mais il faudra se rendre à l’évidence : y aller frontalement ne nous facilitera pas la tâche, de par le nombre d’engeances. C’est pourquoi il nous faudra une diversion, pour qu’une plus petite équipe puisse atteindre les nids afin de les détruire. Une fois fait, nous pourrons les prendre en tenaille et nous débarrasser de leur présence avec plus d’aisance.

Encore une pause, pour lui laisser le temps d’assimiler la stratégie que je lui exposais posément. Le tout, avant d’arriver à la part la plus essentielle de cette conversation.

◊ D’où l’importance d’une force militaire conséquente pour mener à bien cette bataille, et d’où l’existence de cette soirée. Le Garde Nathaniel m’a demandé de faire le tour de cette soirée pour convaincre des personnes clés à cette entreprise, des personnes telles que vous, bann Viktor. On m’a beaucoup vanté vos qualités en termes de connaissances militaires et stratégiques, et combinées à la puissance de nos troupes, nous gagnerons un avantage certain et considérable dans cette entreprise.

Déposant mon verre sur une table proche de moi, je croisai des bras, ne le quittant nullement du regard.

◊ Bien entendu, je ne suis pas ici pour vous forcer la main dans quoi que ce soit, mais je pense que votre voisin des Collines Occidentales saura vous témoigner sa gratitude. Et puis, l’on a souvent la fâcheuse tendance d’oublier la menace que reste l’Engeance vis-à-vis de la sécurité et le bien-être de Férelden, vous ne trouvez pas ?

Question quelque part rhétorique, mais essentielle : il fallait aussi penser à la nation derrière, car cette menace pourrait s’étendre sur d’autres territoires voisins, et ses terres ne se trouvaient pas si loin de cet épicentre que cela. Je terminai en ouvrant un autre sujet, toujours en lien avec ce dont nous parlions, histoire de bien avoir fait le tour de la question avec lui.

◊ Votre aide serait fortement appréciée, bann Viktor, quelle qu’elle soit. Pour tout vous dire, il me reste encore une personne à aller consulter, le Iarl Gell. Autant être honnête avec vous, je le sens moyennement.

Je soufflai du nez, les sourcils froncés. Avec tout ce que j’avais entendu à son sujet, il me semblait quasiment impossible de le convaincre par moi-même. Donc, quitte à avoir besoin d’aide ..

◊ Du peu que j’ai entendu à son sujet, il ne me semble pas aisé de le convaincre sur cette cause en ma qualité de mage Tévintide, si vous voyez ce que je veux dire, et ce même en tant qu’agent de l’Inquisition. Par conséquent, si vous êtes d’accord de m’accompagner et de m’aider à le convaincre de nous rejoindre, vous êtes grandement le bienvenu.

Mon rictus revint, accompagné d’un clin d’œil.

◊ Et ne vous en faites pas pour le côté diplomatique de l’opération, je devrais pouvoir me débrouiller avec lui. Seulement, je me dis que seul un bon et fier Féreldien serait adepte de le convaincre, et pas l’étranger apostat que je suis : donc, simplement d’être à mes côtés changera beaucoup de choses. Je préfère prendre des précautions, car la puissance de ses troupes sera des plus décisives dans la mise en place de cette attaque.

Puis, concluant ma plaidoirie, je haussai des épaules.

◊ Mais encore une fois, c’est à vous de voir. Je ne peux pas vous forcer la main, mais votre aide sera des plus précieuses pour nous, et sur bien des aspects.

D’ici je pouvais voir le cerveau de Viktor bouillir de pensées. Sérieusement, on aurait dit que tout le monde commençait à se demander s’ils comptaient aider à l’instant même, c’en devenait inquiétant à force.

Mais le bann me répondit finalement sans trop traîner sur la question. Il commença à énumérer en marmonnant ce qu’il possédait comme troupes, mais il m’affirma que je pourrais compter sur lui. Je lui tendis un sourire de reconnaissance.

◊ Je mets mon marteau de guerre, Brise-Ogre, au service de votre noble cause ! Quelques-uns de mes compagnons se joindront à nous, mais la plupart de mes hommes resteront dans ma bannorne… question de sécurité.
◊ Tout à fait compréhensible, bann Viktor.

◊ Je jure, sur mon honneur, d’aider la Garde des Ombres à reprendre les Collines Occidentales et le rendre à son Iarl légitime.

Et il tendit une main dans ma direction, main que j’emboîtai rapidement de la mienne dans un salut fort et cordial.

◊ Je ne doute pas un seul instant.
◊ J’imagine que vous avez d’autres gens à voir. Je vous laisse. Peut-être nous reverrons-nous si ses nobliaux ne me tuent pas avant sous leurs inepties.
 Pour Gell... j'ai peur de n'avoir AUCUN atomes crochus avec lui. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.
◊ Arf, ne vous en faites pas pour ça, l’improvisation me connaît fort bien, il faut dire.

Donc, je n’aurai pas le moindre visage potentiellement familier à montrer au iarl .. Seul l’audace pourrait me sauver, j’imaginais. Ma nervosité monta d’un petit cran, conscient que nous aurions besoin de sa force militaire pour avancer. Mais je conservai mon calme, bien entendu, en apparence.

◊ En effet, j’ai d’autres visages à rencontrer, en cette merveilleuse soirée. Tâchez de ne pas vous noyer dans la rhétorique, il est toujours si difficile d’en sortir en un seul morceau !

Et je le saluai d’un geste de la main, avant d’observer le reste de la salle une fois de plus. L’on m’avait fait une vague description du iarl Gell, on me l’avait même montré vaguement en début de soirée, mais il s’agissait alors de le trouver.

Je m’avançai sur un pas autant confiant que prudent, l’œil attentif. Il pouvait se trouver n’importe où, en n’importe quelle compagnie. Je le trouvai finalement, près d’un buffet à observer les alentours. Tiens .. il était seul ? Cela me surprenait un minimum. Je m’attendais à plus de foule autour de ce iarl apparemment polémique.

◊ Qu’il est bon de voir tant d’individus réunis pour une même cause, ne trouvez-vous pas ?

Lentement, je m’approchai alors de lui, sourire aux lèvres. Pour Gell, il faudrait miser sur l’aspect patriotique et d’unité de la nation. La stratégie serait bien entendue à évoquer, et dans le cas d’une mauvaise situation, j’aurais toujours des mots acérés à prononcer pour lui donner de quoi réfléchir.

◊ Oh, mille excuses j’oublie les manières. Dorian Pavus, agent de l’Inquisition.

Je marquai une petite pause, écoutant ce qu’il pourrait bien dire, avant d’entamer le sujet de ma venue.

◊ J’imagine que vous savez déjà si vous comptez soutenir cette cause ? Je serais curieux d'entendre votre avis sur le sujet.

L’homme que j’avais accosté se présenta sous son nom complet, sûrement pour gagner du temps en questions inutiles. Pourtant, il souligna à la fin le fait indéniable que je savais déjà tout cela. Mon sourire s’aiguisa à cette remarque, mais contrairement au sien qui s’évanouit presqu’aussitôt, le mien perdura encore un peu, au bord de la malice. Oh, finalement j’allais peut-être m’amuser tout autant avec lui.

◊ Quel homme perspicace.

Et j’enchaînai sur ma question, à laquelle le Iarl répondit une chose qui, enfin, faisait du sens, mais qui également débordait de surprises.

◊ Si je savais déjà si je soutenais, ou non, l’expédition, je ne serais pas là, Altüs Pavus. Après tout, c’est bien le principe de cette réunion, non ? Essayer de convaincre le maximum de monde de soutenir un iarl pathétique étant incapable de défendre son fief.

Il devait être le premier Féreldien, en dehors de l’Inquisition et des Adeptes, à me qualifier d’Altus – malgré la touche exotique ajoutée au mot de par son accent – au lieu de Magister. Eh bien ? Quelqu’un avec un minimum de connaissances au fin fond du sud ? Ma surprise était grande. Je haussai malgré tout des épaules, avant de répondre une petite pique personnelle pour l’ingrate que j’avais dû me taper en premier.

◊ Vous savez, certains invités sont arrivés ici sans réellement savoir à quoi s’attendre, complètement indécis sur leur décision à prendre .. Surprenant, je vous l’accorde, mais rien n’est impossible.

Il suffisait de voir le trou dans le ciel occasionné par la Brèche, et les failles qui en avaient découlé depuis. Cela dit, Gell Landon n’avait pas dit son dernier mot sur le sujet : aussi déballa-t-il tout en un bloc ce que j’avais besoin d’entendre.

◊ Jusqu’à maintenant, je n’ai pas trouvé raison d’aider Gallagher. Je n’enverrais pas mes Hautes-Lames* dans une entreprise qui ne me rapporte rien. Oh et ne me parler pas de ‘‘défense commune’’ ou ce genre de chose qui marche avec Ser Viktor. Je sais pertinemment que Golefalois me sert de zone tampons. Et si l’engeance passe Golefalois, c’est que Férelden est perdu.

Mmh, intéressant. J’étais donc face à un noble qui ne cherchait que son propre intérêt dans toute cette histoire. Le genre de noble à ne vouloir compter que sur sa propre force, donc en termes d’ententes, il ne fallait pas trop compter là-dessus. Mais malgré tout, le voilà, pointant le bout de son nez. Cela ne voulait dire qu’une chose : son opinion sur le sujet n’était pas définitive. Je hochai lentement de la tête en signe de compréhension, avant de poursuivre.

◊ C’est tout à faire compréhensible de ne pas vouloir sacrifier ses propres soldats pour un noble qui ne vous rendra possiblement rien à la fin, il suffit de voir l’état actuel de ses terres.

Je marquai une pause, réfléchissant à ma tournure de phrase, avant de compléter mes propos afin de ne pas complètement me tirer une balle dans le pied.

◊ Cependant, je ne vous apprends rien, bien au contraire. A votre place, je n’aurais même pas pris la peine de venir, et pourtant vous voilà. Pourquoi avoir malgré tout accepté de venir jusqu’ici, une raison particulière ? un plan particulier en tête ? Je serais curieux d'en entendre davantage.

Le Iarl Gell semblait dépité, et attira mon attention complète sur la foule au loin, une main posée sur mon épaule.

◊ Dites-moi, Pavus. Qui voyez-vous ici ?

Au loin, le Iarl Teagan était en pleine conversation avec d’autres nobles, dans quelque chose qui semblait des plus sérieux, ou du moins solennels. Iarl Gell poursuivit sur sa lancée.

◊ Ce que je veux, Altüs, c’est un acte du Iarl de Golefalois. Il y a deux mois, il a conclu un accord commercial sur le charbon avec le bann Wilhem Mac Vaan. Je veux qu’il revienne sur sa décision. Je m’occuperais du reste.
◊ Si vous le dites.

Et il s’éloigna, me prenant pour acquis. Je réfléchis un instant, pondérant les deux possibilités. Je ne savais pas grand-chose sur ce noble, mais j’étais conscient d’une chose : qu’un agent de l’Inquisition se mêle soudainement des accords politiques entre différents nobles était tout sauf une bonne idée. Nous aurions certes besoin de renforts armés, mais au pire nous aurions qu’à offrir un soutien plus ferme. Autant éviter des ennuis à l’Inquisition – surtout que cela allait me retomber dessus, forcément.

Le temps de trouver quoi faire, mon regard croisa celui de Teagan. Evidemment. Quel timing. Il me fit un geste et marcha dans ma direction, et j’en fis tout autant.

◊ Passez-vous une bonne soirée, Iarl Teagan ? De mon côté, je dois dire que certains ont de l’audace, ma foi.

Retrouvant du coin de l’œil le Iarl Gell, entouré de convives qui riaient tous en cœur, je poursuivis.

◊ Le Iarl Gell m’a fait savoir qu’il ne se joindrait à cette cause que si je parvenais à vous convaincre de rompre un accord de charbon entretenu avec un certain Wilhelm. L’Inquisition est une institution qui se veut neutre, je ne suis pas venu ici pour fourrer mon nez dans les affaires d’autrui. Mais au moins, il pourra se dire qu’il aura essayé.

Je marquai une pause, reportant mon attention sur le Iarl.

◊ Par conséquent, j’ai le regret d’annoncer qu’il ne sera présent parmi nous lors de cette attaque. Je puis essayer de demander quelques renforts armés de la part de l’Inquisition, en compensation.

Souriant de plus belles, je croisai les bras, curieux désormais de l’entendre sur le sujet.