[Abandonné | non-canon | FB 9:41] Au fil de la conversation, des liens tissés [PV Elia]

La petite troupe se dispersa à peine leur chef leur en avait-il donné l’autorisation. Charlie avait beau apprécier les membres de la compagnie, surtout son amie Finley, il n’était pas contre un peu de solitude de temps à autre. Surtout avec ce qu’il avait l’intention de faire. Il n’avait pas envie d'entendre une remarque de qui que ce soit, même seulement pour le taquiner.

Ce n’était pas honteux à proprement parler, mais il n’était pas à l’aise avec tout ce qui avait plus ou moins trait à son corps et faire la commande d’une nouvelle tunique auprès d’une couturière du coin en faisait partie.

Ses doigts effleurèrent sa besace, qui renfermait le tissu qu’il avait déniché sur les marchés de Combreland. Il n’avait pas pu s’empêcher de dépenser une bonne partie de sa solde dedans, sur un coup de tête qui ne lui était pas habituel. Mais l’étoffe vermillon aux reflets orangés lui avait rappelé avec la force d’un coup de poing les couleurs chatoyantes de son pays natal.

C’était comme retrouver un bout de chez-lui, alors qu’il était un nomade. Il n’avait pas pu résister.

Avec un soupire, il se dirigea dans les ruelles de la petite ville de Gastavar, où ils resteraient quelques jours pour une mission de chasse. Des loups semblaient rôder aux alentours et ils étaient censés les exterminer, ou tout du moins enquêter sur leur présence supposée. Au moins, cela lui laissait le temps de prendre commande auprès d’une couturière. Il avait demandé des adresses à l’aubergiste où ils logeaient et, passé l’étonnement dû à son apparence, il lui avait conseillé une jeune couturière.

Il s’arrêta devant une maison, examina d’un œil rapide les alentours. Ça devait être là. Par un réflexe poli, il frappa à la porte avant d’entrer. Il poussa timidement la porte, se baissa pour ne pas se prendre le linteau. Il passa une main derrière sa tête, avant de demander à haute voix.Il n’avait jamais passé commande auprès d’une couturière et il y avait un nœud au fond de son ventre qui ne voulait pas partir. Il ignorait quoi faire et improvisait totalement. D’habitude, il se contentait de rapiécer ses vêtements, pour éviter le contact avec des humains qui pouvaient vite se montrer hostiles.

Ses doigts agrippèrent la bandouillère de son sac alors qu’il restait sur le pas de la porte. Il tira sur le cuir épais, anxieux, passant d’un pied sur l’autre. Et si l’humaine ne voulait pas de lui comme client, par peur ? Il ignorait quand il aurait à nouveau assez de temps pour laisser à un artisan l’occasion de faire du bon boulot.

Il craignait que le rouleau de tissu ne finisse par s’abîmer au fil de ses voyages, ou qu’il le perdît par malchance ou maladresse.

Peu après que Charlie eut appelé après la couturière, un corbeau vient voleter devant lui, comme pour le faire patienter. Curieux, il l’observa sans bouger. Était-il domestiqué, ou était-ce une bête sauvage qui était rentré par une fenêtre ?

Quel choix étrange d'animal de compagnie, dans le premier cas. Les corbeaux avaient une mauvaise réputation, considérés comme des présages de mort. Ce que le Qunari pouvait comprendre, vu que ces charognards arrivaient souvent après les combats pour dévorer les cadavres des malheureux tombés.

Il n’arrivait cependant pas à déterminer si cela devait renforcer sa méfiance envers la couturière ou s’il s’agissait d’une lubie comme une autre, dont il n’avait pas à se soucier.

Charlie cessa cependant de prêter attention au corbeau quand une petit elfe rousse sortit de l’arrière-boutique pour l’accueillir. Il n’avait pas imaginé un instant que la couturière que l’aubergiste lui avait recommandé pouvait être une elfe, une jeune fille d’autant plus. Un sourire fin étira ses lèvres, apaisé malgré lui par ce fait. Il craignait moins les elfes que les humains, pour avoir vécu une grande partie de sa vie avec des Viddhataris qui étaient majoritairement de cette race-là.

Et puis, avec Finley dans les pattes depuis des années, avec son parler franc et son coeur gros comme le monde, il avait sans nul doute une vision un peu biaisé des choses.

Il retint un soupir quand il devina à son bonjour timide qu’il devait l’intimider, avant que les yeux bleus de l’adolescente ne brillent soudain. Il plissa légèrement les siens, devinant à la trajectoire de son regard qu’elle admirait ses cornes. Au moins ne paraissait-elle pas avoir peur de lui, semblant même admirative.

Elle lui demanda en quoi elle pouvait l’aider, de façon un peu plus assurée. Il ouvrit sa besace, en sortit le tissu soigneusement plié et le lui tendit à deux mains. Accepterait-elle cet ouvrage démesure ? Elle paraissait si jeune… Peut-être s’effrayerait-elle de sa taille et de sa carrure, qui lui demanderait beaucoup de travail ?

Il ne pouvait pas savoir avant de poser la question. Il ne pouvait qu’espérer qu’elle acceptât, ou il devrait encore patienter quelques semaines avant de trouver un couturier, s’il avait de la chance.Peut-être aurait-il dû préciser à l’aubergiste pour quelle tâche il requérait un couturier. Peut-être l’humain avait-il songé qu’il s’agissait d’un petit travail, comme recoudre les boutons de son gambison, ou réparer un accroc trivial. Charlie savait faire ce genre de choses, cela ne demandait pas beaucoup d’efforts ni de temps, au contraire de la confection d’un habit.

Le regard brillant de ce qui semblait être de la curiosité lui rappelait cependant le regard de Finley alors qu’elle découvrait le Qun. Malgré ses mensonges pour se mettre à l’abri, elle avait été fascinée par toute la culture qu’elle découvrait, même si elle n’avait jamais adhéré à la pensée.

La couturière n’avait sans doute jamais rencontré de Qunaris, ou même de Tal-Vashoffs, maintenant qu’il y réfléchissait. Pas étonnant qu’elle semblât aussi curieuse, bien qu’il se fût plus attendu à de la peur. Mais elle devait être quelqu’un de plutôt atypique, s’il en jugeait par la compagnie du corbeau.

Il se força à sourire gentiment, bien qu’il n’y soit guère habitué, avant d’ajouter :Charlie avait du mal à se montrer avenant, il en avait bien conscience, mais chaque fois qu’il le pouvait, il s’employait à montrer qu’il n’était pas si effrayant. Il refusait l’idée que les actes des Qunaris impactassent à ce point la vie des Tal-Vashoffs.

Charlie retint un sourire devant la tentative ratée de l’adolescente de paraître plus vieille qu’elle ne l’était en utilisant un mot compliqué. Il aurait pourtant été le dernier à lui jeter la pierre pour utiliser des mots simples ; il aurait ainsi moins craint de ne pas comprendre tous ses propos.

Au moins, il avait sa réponse ; le corbeau semblait être son animal domestique, un choix étrange, donc. Mais il doutait que la petite put lui faire quoi que ce soit. Elle n’avait pas l’air bien musclée et n’était pas très grande ; elle ressemblait plus à un amuse-gueule pour Hurlock qu’à une menace.Il lui tendit sans hésiter le tissu lorsqu’elle le lui demanda, l’observant l’examiner. Sans doute réfléchissait-elle à la faisabilité du projet pour elle, ce qui fut confirmé par les paroles qui suivirent. Charlie s'attendait ainsi à ce qu’elle refusât, ce qui ne fut pas le cas, à sa grande surprise. Il inclina alors juste la tête pour acquiescer, cherchant à comprendre un peu mieux l’adolescente qui n’hésitait pas à se lancer dans une telle entreprise.

Un sourire étira ses lèvres alors qu’il voyait que la petite couturière tentait de retenir ses ardeurs, expliquant qu’elle était indiscrète. Sans doute avait-elle peur de le froisser, mais à moins qu’elle ne demandât des détails sur son passé, il avait peu de choses à cacher et peu de choses qui pouvaient réellement le blesser, désormais.Il cligna des yeux ensuite au flot de questions, avant d’éclater d’un rire puissant, une main sur son ventre. Oh bon sang, il comprenait tellement mieux les aprioris sur sa race si ce genre de rumeurs étaient monnaie courante sur Thédas ! Et cela expliquerait pourquoi les Gardes en Orlaïs avaient mis si longtemps avant de se comporter normalement avec lui.

Bon sang, il en avait mal au ventre tellement il trouvait ça drôle.

Il se demandait soudain si Howard l’avait accepté car, ayant vécu à Kirkwall, il n’avait pas ce type de stéréotypes en tête, ou si c’était parce que le village de la couturière était plutôt petit, et donc souvent moins ouvert à l’étrange.Elle avait l’air adorable des enfants réfugiés qu’il aidait avant de rejoindre les Lames Pourpres. S’il en doutait encore, il aurait cessé de la considérer comme dangereuse à cet instant. Oh, il ne doutait pas que des Viddatharis bien entraînés pouvaient sembler aussi jeunes, vulnérables, tout en étant capable de lui trancher la gorge. Mais dans un village aussi petit, cela lui semblerait bien improbable.Charlie ne voyait pas comment expliquer clairement à l’adolescente le rapport des Qunaris aux dragons. Il ne trouvait que des termes en qunlat sur le bout de sa langue. Il refusait d’employer le mot vénérer, les Qunaris n’entretenaient pas la même relations avec ces maîtres des cieux que la Chantrie avec Andrasté et leur Créateur.Il esquissa cependant une grimace gênée. Il ne savait pas trop par quel bout aborder le sujet complexe des mages dans la société Qunari. La Chantrie paraissait bien plus tolérante en comparaison.C’était une pirouette pour éviter le terrain glissant. Il ne pouvait pas dépeindre à la jeune fille la réalité des mages dans sa vie d’avant. Si elle n’était pas extrémiste, elle risquait de se retrouver choquée et elle lui semblait encore bien trop jeune pour en entendre parler.Il gratta sa nuque, n’osant ajouter que cela pouvait être aussi par difficulté de trouver quelque chose à leur taille, et les Tal-Vashoff restaient généralement assez peu souvent au même endroit trop longtemps pour faire confectionner quoi que ce soit. Les Benhassraths restaient une menace, même après des années de fuite.