Le Deal du moment : -40%
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 ...
Voir le deal
59.99 €
Le Deal du moment : -50%
-50% Baskets Nike Air Huarache Runner
Voir le deal
69.99 €

Page 1 sur 2 1, 2  Suivant

Lun 23 Mar 2020 - 21:29

Anonymous
Invité

Invité


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies.



9:36 du Dragon

I
l avait repoussé ce moment toute la journée. Pourtant rien ne l'obligeait à s’asseoir à sa table, pour écrire cette lettre. Ou plutôt, si... Quelque chose l'y obligeait. Une gêne, logée au creux de son cœur. De l'inquiétude ? Légèrement enivré par le vin de cette belle soirée, Crassius s'installa à son bureau, et déboucha brusquement son encrier. Il y plongea sa plume, et la laissa courir sur le papier, laissant son cœur déverser ses mots, sans retenue aucune.

En seulement deux minutes, il avait terminé sa besogne. Pensivement, il souffla sur l'encre désireux d'abréger au plus vite cette étape de séchage qu'il trouvait toujours interminable. De sa main gauche, il chercha une enveloppe. Mais quelle adresse y noter ? À qui adresser cette lettre ? Comment allait-elle trouver son ami ? Tant d'incertitude demeurait....









M

on très cher Dorian :




De nous deux, la logique aurait voulu que je sois celui qui disparaisse en premier de notre belle société. Mes occupations, mais pire : ma naissance, m'y prédestinaient sans aucun doute.

Et pourtant, non. Tu es celui qui s'est évaporé.
Où es-tu allé l'ami ? Personne ne semble être en mesure de me renseigner, et ta délicieuse compagnie ne venant plus illuminer mes brefs passages à Minrathie, je commence à me morfondre, et petit à retrouver ma détestable condition de Laethan inexistant.

J'espère que tu vas bien, que tu es simplement en train de cuver du bon vin en bonnes compagnies, et que mon existence t'es tout simplement sorti de l'esprit.

À très vite j'espère.
Ton ami Crassius.


Minrathie, 9:36 du Dragon



Mer 25 Mar 2020 - 11:37

Dorian Pavus
Dorian Pavus

– Inquisition –

Messages : 322
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies

9:36 du Dragon
Feat. Crassius Servis
Fidèle correspondance - ☀ ☀ ☀ ☀


Encore une nuit sans sommeil. J'étais resté au chevet de Félix, surveillant son état. Par miracle, il dormait. Le sommeil agité, mais au moins, il en avait. Quel soulagement.

Une servante se pointa près de moi, après avoir soigneusement toqué à la porte, pour m'apporter une lettre. Une lettre ? Mes jours étant tous les mêmes, se mélangeant dans une trame temporelle inexistante, ce genre de singularité avait le don de me mettre une claque et de revenir dans le présent.

Il me fallut du temps pour, déjà, prendre le temps de répondre, mais aussi de rassembler mes mots. Que dire à Servis ? Je ne pouvais pas l'inquiéter davantage. Je soufflai du nez, un peu perdu. Je ne pouvais pas non plus lui mentir sur ma situation, mes réflexions.

Mon écriture tremblait légèrement, mais elle tenait le coup. Mon poignet souffrait déjà suffisamment d'avoir tant écrit, d'avoir tant pris en note, d'avoir tant analysé les différentes observations. Ce quotidien allait probablement finir par avoir raison de moi, mais pour le moment, je pouvais m'en sortir. Je croyais. En vérité, je ne faisais que me voiler la face sur mes réelles conditions. Mais je préférais ne pas trop inquiéter les gens.









Crassius,

Que tu sortes de mon esprit aurait été une solution bien plus simple pour moi. Je vais être honnête, c’est un peu difficile en ce moment. Mais je tiens la route.

Je suis actuellement à Asariel, et je n’ai plus vraiment d’occasion pour écrire, même si je le fais encore un peu pour bêtement donner des nouvelles. Il est vrai que je n’ai plus écrit depuis plusieurs mois maintenant que j’y repense, j’essaierai de prendre le temps de le faire.

Cela doit bien faire bientôt un an que je me trouve là-bas, j’ai dû partir assez urgemment. Je ne serais pas surpris que tu aies trouvé suspect que je m’arrête droit avant que je devienne seigneur enchanteur, ou autrement dit le grand but que j’avais dans mon existence en attendant d’en trouver un deuxième. Il y a des raisons, comme dans chacun de mes agissements.

Le fils de mon mentor est actuellement malade. On ne sait pas encore combien de temps il lui reste, mais pour le moment, il tient le coup, essentiellement grâce à nos recherches.

Je suppose que l’équipe se porte bien, et toi aussi d’ailleurs. A tantôt, j’espère.

Prends soin de toi tout de même, d’accord ?



D. Pavus


Mer 25 Mar 2020 - 12:39

Anonymous
Invité

Invité


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies.



9:36 du Dragon

C
rassius se retourna, une nouvelle fois, incapable de trouver le sommeil. Une respiration légère à ses côtés trahissait la présence de Galla, dénudée et glissée à ses côtés sous les draps. Il se redressa dans l'obscurité relative de la pièce et tâta du bout des doigts le sol aux pieds de son lit. Une bouteille de vin, vide, roula dans un cliquetis lourd. Sa position inconfortable lui arracha une grimace, et il dû s'empêcher de ne pas se recroqueviller, les mains contre les plaies qui lui lacérait encore les reins. Il pouvait supporter cette douleur.
Enfin, il trouva ce qu'il cherchait : un petit panier dans lequel avait été jeté à la hâte son courrier du jour, un encrier de fortune ainsi que de quoi écrire. Il remonta le tout sur le lit, s'adossa contre le mur et chercha à déchiffrer la dernière lettre dans les rayons filtrant entre les rideaux. L'après-midi venait à peine de débuter.

Il parcouru de nouveau la lettre de Dorian. Cette lettre qu'il avait au départ tant attendue, pour finalement l'oublier tout à fait. Son ami lui semblait si loin à présent, comme un souvenir brumeux d'une trop bonne soirée.
Pourtant, même si Dorian lui semblait à présent loin, ses mots réveillèrent une certaine colère en lui, une colère qui n'avait pas sa place dans cette chambre. Une respiration légère à ses côtés trahissait la présence de Galla, dénudée et glissée à ses côtés sous les draps.
Ses premiers mots se firent secs. Mais plus il écrivait, plus sa colère initiale s'apaisait. La douce respiration de Galla le berça. Il se fit progressivement plus patient.

Finalement, il jeta sa plume au sol, et repoussa plus bas le reste du panier. Dans un soupir de contentement, il roula jusqu'à son amie, à qui il déposa un baiser sur l'arrondi de l'épaule, avant de faire glisser ses mains sous les couvertures, contre sa peau.










D

orian



Pourquoi avoir attendu tant de temps pour te manifester, surtout compte tenu de ta situation ?
Si je ne me trompe pas, tu fais référence dans ta lettre à Felix Alexius ? Quelques-uns ici, à Minrathie, parlent du grand malheur qui s'est abattu sur Gereon Alexius, comment ai-je pu ne pas faire le lien ?

Pour te sortir de ce mauvais pas, de ton année à Asariel je veux dire, cette ville qui semble si austère en comparaison des merveilles de notre douce Minrathie, je peux m'offrir de te porter des nouvelles de notre petite troupe.

J'ai vu hier le second enfant de Marcius. Bien que privé de notre nom, cet enfant porte déjà au milieu de son visage le plus bel atout des Servis. Il ressemble heureusement assez peu à sa mère.

Le mariage d'Ulio a eut lieu le mois dernier. Il était comme tu peux te l'attendre somptueux. Ulio je veux dire, pas le mariage.
Cassius semble perdre la tête ces derniers temps. Ces choix se font de plus en plus stupides. Un jour il va s'engager dans l'armée, et personne n’en sera étonné.






Quant à moi, je me remets doucement d'une blessure qui m'oblige à garder le lit encore quelques jours. Ma plume, un bon tas de papiers et mon encrier me permettent de passer un peu le temps qui me semble long lorsque je ne peux pas bouger.

En espérant ne pas devoir attendre une nouvelle année avant de recevoir de tes nouvelles.


Crassius Servis.





Minrathie, 9:36 du Dragon



Mer 25 Mar 2020 - 17:46

Dorian Pavus
Dorian Pavus

– Inquisition –

Messages : 322
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies

9:36 du Dragon
Feat. Crassius Servis
Fidèle correspondance - ☀ ☀ ☀ ☀


Où était-elle passée ?

Me voilà, à remuer ciel et terre dans mon endroit clos à fouiller dans mes paperasses. Il était le milieu de la nuit, j'étais mort d'épuisement, mais cette lumière d'effroi avait parcouru mon échine : Servis m'avait écrit, et je m'étais promis de me forcer à lui répondre, pour mon propre moral personnel. Je finis par m'écrouler au coeur de ma petite office, les poings contre le sol, sentant ma frustration bien plus affûtée qu'à l'ordinaire. Je devais retrouver cette lettre. Je le devais.

Au bout d'un certain temps, j'entendis frapper gentiment à la porte. Je n'eus même pas la force de redresser la tête, mais après quelques instants, je sentis une main sur mon épaule. Anah, cette servante qui systématiquement me donnait toujours mon courier, ou m'apportait du café, ce genre de petits gestes. Une bougie en main, elle posait sur moi un regard inquiet, me demandant si j'allais bien, pourquoi je ne dormais pas. Je soupirai, regardant ma paperasse avec dépit, lui expliquant ce que je cherchais. Anah posa son cierge par terre et décida de me filer un coup de main pour fouiller.

Après davantage de temps - probablement des heures -, j'aperçus le visage d'Anah s'illuminer sous la lueur de la petite bougie. Puis, d'un geste souple, elle brandit la lettre en l'air, comme une enfant qui trouvait un trésor. Je me sentis soupirer de soulagement ; j'aurais pu l'avoir jetée par accident, j'aurais pu en avoir fait n'importe quoi, mais la voilà, pliée certes, mais bel et bien visible. Elle me la tendit avec son sourire poli, sourire auquel je répondis d'un hochement de tête, accompagné d'un maladroit remerciement.

Anah quitta la pièce avec un sourire, me signalant qu'elle allait voir comment se portait Félix. Elle ne manqua cependant pas de me recommander gentiment de me coucher. Je lui souris, avant de rester assis au coeur de mon refuge, la lettre dans les mains. Allumant une flammèche avec mes doigts, je la relus. Et encore. Je cherchais concrètement au fond de moi ce que je pourrais bien lui répondre.

Il me fallut cependant plusieurs tentatives, ainsi que plusieurs crises de nerfs, mais après plusieurs jours, je parvins enfin à écrire une lettre sans rature, sans tremblements, sans rien qui pourrait me trahir plus que mes mots.









Crassius,

Pardon d’avoir mis du temps à répondre, j’avais laissé ta lettre se perdre dans mes paperasses de recherche. Je l’ai retrouvé cette nuit en faisant du tri, je n’avais pas oublié que tu m’avais écrit, mais je préférais garder ta lettre pour me rappeler de tout ce que tu y abordes, et ce sans oublier un seul élément. Il serait fâcheux de ne te répondre qu’à moitié.

J’espère que ça ira pour ta blessure. Bon, après deux mois et demi, j’imagine que tu te portes mieux. Essaie de faire plus attention à toi tout de même, sinon j’écris à Ulio pour lui quémander de t’en coller une de ma part.

En parlant de Ulio, je suis content que son mariage se soit bien passé. Je regrette fortement de ne pas avoir pu venir, j’aurais bien aimé le voir encore plus somptueux de parures et de soie qu’il ne l’est déjà - mais si tu veux mon avis personnel, je doute que ce soit possible. Quoique, je puis être surpris.

Je vais être honnête, ça me réchauffe le coeur d’imaginer comment la soirée s’est déroulée, ou d’entendre des nouvelles de ta petite équipe. Vois-tu, ici je suis cloîtré entre quatre murs, à travailler jours et nuits. Je commence à perdre le fil du temps, et les nerfs également pour être totalement franc.

Mais oui, il s’agit bien du “grand malheur qui s’est abattu sur Alexius”. J’ignorais qu’il y avait eu des échos de cette tragédie, lui qui ne parle plus du tout à personne depuis, et qui s’est enfermé chez lui. Il m’avait écrit pour me demander de l’aide, et je mentirais en disant que je n’ai pas hésité longtemps avant de partir pour Asariel. Ce fut dur de choisir, mais Félix avait besoin d’aide.

Là, je garde un oeil sur lui, accoudé à sa table de nuit pour te répondre tardivement. Son état semble s’être stabilisé, c’est un grand soulagement. Mais c’est dur, Crass.

Transmets mes sincères félicitations à Ulio et à Hécate pour leur mariage, et si tu as quoi que ce soit de palpitant à me raconter, n’hésite pas trop longtemps avant de le faire : ça me fait du bien de lire tes lettres, pour être honnête. Je pense que je vais les garder précieusement dans mon carnet, et je les relirai si mon moral baisse. Je ne peux pas me le permettre, vois-tu,  maintenant que Félix semble davantage en meilleur état. Il a besoin de quelqu’un de solide à ses côtés, et je demeurerai ce quelqu’un.

Prends soin de toi, et transmets mes salutations et pensées à l’équipe.

Sincèrement,


Ton ami, Dorian


Mer 25 Mar 2020 - 18:33

Anonymous
Invité

Invité


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies.


À l'abri de la pluie et du vent, Crassius était assit à même le sol, ses vêtements de travail couvert de boue et imbibée d'une eau saumâtre. Une tempête de tous les diables avait interrompu les fouilles, et mit toute l'expédition à l'arrêt. Sous l'unique tente encore préservée des fuites, un bon nombre des membres de l'expédition s'entassaient, dans un brouhaha de tous les diables. Lassé de jouer aux dés, Crassius était allé à la rencontre de l'intendant, lui réclamant son dernier courrier en date. La lettre qu'il lui avait remise était étrangement décachetée.

Sous son abri, Crassius avait lu la lettre de Dorian avec attention. Puis il l'avait laissé de côté, fouillant dans son paquetage des petits paquets qu'il s'était amusé à constituer ces derniers jours. Des fleurs qu'il avait fait sécher entre deux pages, des graines ou de la mousse. Des échantillons de la nature qui l'entourait, qu'il avait destiné à Galla, avant d'apprendre qu'elle s'était finalement trouvé un mari. Ces présents semblaient d'un coup trop romantiques, trop désespérés : il ne convenaient plus à la relation qu'ils devraient entretenir à présent.

Les envoyer à Dorian ne lui semblait pas être une mauvaise idée. Ne disait-il pas lui-même être reclus ? N'était-ce pas là une façon charmante de lui faire partager, facilement, l'aventure qu'il était en train de vivre ?

Profondément heureux malgré la tempête, Crassius ne se sentit pas le moins du monde trahis par le cachet défait de sa lettre. Il ne parvint pas à étoffer ses mots, à s'inquiéter de l'état de son ami. Le tonnerre au-dehors le faisait se sentir incroyablement vivant. La terre sous ses ongles ne le dérangeait pas, pas plus que la ville ne lui manquait. Oui, Crassius était heureux.





T
rès estimé Dorian Pavus,

Je me dois de t'informer que ta lettre n'a pas trouvé son destinataire.
Vois-tu, Crassius est déjà reparti en me confiant ses correspondances.
Bien évidemment, il ne m'a jamais demandé d'en défaire le cachet pour les lire, seulement de les lui transmettre à son retour. Mais c'est un petit bonus que je m'octroie de temps en temps, lorsque l'expéditeur me semble prometteur. Et ta lettre a su retenir mon attention.

Je souhaiterais déjà te remercier pour tes vœux. De ne pas te voir à mon mariage m'a certes... Contrarié quelque peu, mais je saisis maintenant ce qui t'en a empêché.
Si Alexius est venue te demander ton aide, alors Felix est entre de bonnes mains. Alexius est l'un des mages les plus brillants de l'empire, et ton potentiel à toi est reconnu de tous. Il suffit parfois de si peu pour accomplir de grandes choses. Et c'est sur le chemin de la grandeur que tu t'es engagé Dorian. C'est... Beau.

Je me vois quand même dans l'obligation d'exprimer mon irritation: penser que tu écris à Crassius, et non à moi... Je trouve cela injuste, après ce que nous avons partagé. Enfin, je n'arrive pas à t'en vouloir longtemps. Prend soins de toi, et je vais transmettre ta lettre.

Ulio Lucanus, enchanteur sénior.












D

orian,



T'imaginer, toi plus que tout autre, enfermé entre quatre murs jour et nuit me soulève le cœur. Je remplis cette enveloppe de toutes les essences les plus rares qu'il m'est arrivé de croiser ici ! Je trouve ces fleurs séchées fascinantes, tu ne trouves pas ? Je te glisse aussi quelques graines, qui sait, peut-être prendront-elles racines ?
Oh, et ta lettre m'est parvenu décacheté. J'en conclus que mon choix de nommer Ulio secrétaire de mes correspondances n'était pas des plus judicieux. Je m'excuse s'il est entré en contact avec toi par le biais de notre correspondance. Je ne sais pas ce qu'il a pu t'écrire, mais sache que je me dissocie de ses dires.

Bien, je te laisse à présent te focaliser sur tes recherches. Je dois également poursuivre les miennes.

Au plaisir de reprendre la plume. Servis.





Minrathie, 9:36 du Dragon



Mer 25 Mar 2020 - 21:52

Dorian Pavus
Dorian Pavus

– Inquisition –

Messages : 322
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies

9:36 du Dragon
Feat. Crassius Servis
Fidèle correspondance - ☀ ☀ ☀ ☀


J'avais à nouveau essayé de frapper à sa porte, mais rien. Toujours rien. Rien, à part une espèce de grognement fantomatique après bien des tentatives sans réponses. A croire qu'en plus de devenir l'ombre de lui-même, Alexius devenait un animal qu'il faudrait abattre à cause d'une maladie qui le rongeait. Peut-être bien, finalement, que le deuil le rongeait de la même façon que la corruption rongeait Félix. Mais ça ne pouvait pas durer. Je quittai tout de même ce couloir de plus en plus miteux et sombre, silencieusement.

Mais après quelques pas à peine, une espèce de frustration furieuse m'embrasa, et un battement de cils suffit pour que mon poing ait déjà heurté le mur le plus proche, accompagné d'un hurlement. Cette situation ne pouvait pas continuer. J'allais finir par craquer davantage, et je ne pouvais pas me le permettre. J'étais encore jeune, j'avais encore tant de choses qui attendaient devant moi.

Je remontai auprès de Félix après avoir approximativement fait quelque chose pour ma main - je m'étais un peu écorché à cogner ce pauvre mur innocent. Une fois devant la porte, j'inspirai un bon coup, histoire de paraître serein, puis j'ouvris prudemment la porte.

Félix lisait, assis dans son lit, et leva sur moi un regard curieux, avant de me sourire légèrement. Je lui rendis un sourire crispé et minime, car je savais d'avance que même si mon visage et mes micro expressions ne me trahiraient pas, il comprendrait que rien n'allait. Après tout, dans cette situation, il ne le savait que trop bien.

Récupérant un morceau de papier, même deux, ainsi que de quoi écrire, je m'installais à sa table de chevet pour répondre aux lettres auxquelles je devais répondre rapidement. Au moins, cela m'occuperait. Nous discutâmes un peu de tout et de rien, et il fallait dire que cela me faisait du bien. Je savais que Félix minimisait ses conditions et ses douleurs, pour essayer d'être au top niveau confident dans l'instant, bien que j'étais contre cette idée. C'était à moi de jouer ce rôle de soutien pour lui. Peut-être étais-je la dernière personne qu'il verrait dans sa vie, et rien que cette pensée me serra douloureusement le coeur. Lui dire au revoir serait difficile, il était vrai.

Je commençai à écrire, serrant des dents quant à l'état de ma main. Il fallait dire que j'avais laissé une sacrée marque dans la paroi. Je m'efforçai de trembler le moins possible, surtout pour Ulio. Je ne supportais pas de montrer des signes de faiblesse. Avec Crass c'était légèrement différent, dans la mesure où nous étions déjà confidents mutuels de base. Lui me connaissait pour l'homme que j'étais, Ulio, même après autant de temps, j'en doutais encore un peu.









Très cher Ulio,

Je préfère toujours la franchise, je dois dire que je n’avais pas pensé à t’écrire. Je comptais prendre de tes nouvelles à travers notre connaissance commune, cela me semblait plus simple que de me perdre en mille et une lettres ; mais pour sa majesté, je ferais un effort, mille excuses. C’est que j’ai de moins en moins de temps pour penser ici, imagine donc écrire.

Je ne suis nullement surpris d’apprendre que Servis est une fois de plus de sortie. Il semble de plus en plus investi dans son travail, ça fait plaisir à lire.

J’aurais vraiment aimé être là, imagine l’adrénaline que ça aurait été de perturber ta si spéciale journée de la plus belle et calculée des façons. Un tel endroit, un tel jour, cela aurait été si amusant.

Félix va bien pour le moment, j’ose espérer que cela va durer.

Si tu savais à quel point vous me manquez tous - toi particulièrement, et je ne le dis pas simplement pour entrer dans tes bonnes grâces. Ça me manque de dormir, de me relaxer dans un confortable canapé, un verre de vin dans une main, de la bonne compagnie dans une autre, à ne penser à rien, à me laisser aller un peu. Ça me manque de boire jusqu’à en perdre la tête, ou de me battre à mains nues avec le mécréant qui a osé m’importuner dans mon élan d’allégresse.

J’espère que nous aurons l’occasion de faire tout cela à nouveau ensemble, comme avant, si d’aventures un jour je pusse partir d’ici.

Prends soin de toi très cher, et j’espère te revoir bientôt.


Dorian







Crassius, cher ami,

Je suis heureux d’avoir de vos nouvelles à tous. Je n’ai pas envie de vous inquiéter pour pas grand-chose, je vais encore assez bien. Je crois. A vrai dire, c’est difficile à déterminer, depuis le temps. Je dirais que ça va, mais probablement qu’objectivement, ce n’est absolument pas le cas.

C’est de plus en plus difficile de tenir le coup face à Alexius : je comprends qu’il ait grandement du mal à faire son deuil, à accepter les événements, mais j’ai la sensation qu’il commence à perdre pied. Et ça fait mal d’être à côté de lui, de ce modèle que j’ai eu depuis si longtemps, et de le voir devenir l’ombre de qui il a été. Son état m’inquiète, mais il refuse de se poser un peu, de souffler, ou simplement de redescendre sur terre. Nous sommes malencontreusement dans une forme d’impasse dans ses idées, mais il refuse de l’admettre. C’est dingue à quel point il est encore plus têtu que moi à ce niveau-là.

Cela doit bien faire deux jours que je ne l’ai pas vu. J’essaie de prendre un peu soin de moi, ainsi que de Félix, mais je n’en peux vraiment plus. Je ne sais pas combien de temps tout cela va encore durer, voire s’il y aura vraiment une fin à tout ça. J’ai envie que tout s’arrête, Crass. J’ai préféré épargner cette partie à Ulio, je n’ai pas envie qu’il s’inquiète pour rien.

Cette situation est invivable, et elle perdure depuis un petit moment maintenant. Et je suis actuellement dans cette impasse où je dois subir ça pour au moins veiller sur Félix. Je trouve la situation si injuste, si stupide, et si je te parlais de tout ce qui se passe réellement entre ces quatre murs infernaux, je ne pense pas que tu me croirais, et je comprends : si je me le disais à moi-même, je ne me croirais pas - ou je refuserais de me croire.

Cela fait deux jours qu’Alexius s’est enfermé dans ses recherches, mais seul cette fois-ci. Nous avons touché l’impasse, mais il refuse de chercher une autre piste, ou de simplement abandonner. La corruption des engeances est une maladie incurable, et même si sa famille était sa source de joie première, il doit accepter de les laisser partir. Mais du coup le problème, c’est que tout ce temps qu’il pourrait passer avec son fils, il le gaspille à essayer de franchir l’infranchissable. C’est débile, car après il se plaindra qu’il n’a pas eu assez de temps à ses côtés, et après ce sera ma faute.

Je suis encore là pour Félix, car il ne peut pas rester seul dans une situation pareille, mais je ne sais pas combien de temps mes nerfs tiendront. Donne-moi de la force Crass, j’en aurai besoin. Grandement.

Prends soin de toi, et évite de trop te perdre dans ton meilleur ami qu’est le sable, si tu es toujours dans ton travail, perdu au milieu de rien et avec quelques petites ruines palpitantes. Mes salutations et pensées au reste du groupe.

Sincèrement,


Ton ami, Dorian


Jeu 26 Mar 2020 - 9:55

Anonymous
Invité

Invité


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies.


Dans la chambre qui l'avait vu grandir toute sa vie, Crassius se sentait à l'étroit. Par-delà ses fenêtres ouvertes, il pouvait entendre les bruits de Minrathie. Minrathie l'immense, Minrathie la majestueuse, la terrible. Cette ville l'avait pourtant fasciné une large portion de sa vie. Ses mystères, sa magie, ses faces sombres... Et surtout les nombreuses possibilités qu'elle semblait offrir, à toute heure du jour ou de la nuit. Minrathie, aux yeux de Crassius, n'exerçaient plus la même influence sur son cœur. Il voulait fuir ses bruits, se soustraire à ses odeurs devenues maintenant trop familières. Même la voix de sa mère, depuis l'autre côté de la porte, provoquait chez lui une étrange sensation de rejet.

*Cela fait seulement deux heures. Deux heures que tu as fermé cette porte. Montre toi un brin patient, veux-tu bien ?* Se dit Crassius en refermant son livre et en se redressant sur son siège. Il se leva complètement, et fit quelques pas dans sa chambre, les yeux clos. Il chassa de son esprit Minrathie, cherchant à invoquer le néant, à libérer son esprit de la frustration qu'il sentait monter en lui. *Oui, voilà, c'est ce calme-là que je cherche.*

Il ouvrit les yeux, et s'installa à son bureau. Sur le plateau de bois sombre, un petit tas d'enveloppes avait été déposé. Ulio, ayant appris son retour, s'était empressé de les lui apporter. Crassius l'avait trouvé sombre, peut-être même profondément triste. Il n'avait ouvert aucune des enveloppes, et il avait même refusé le verre proposé par Crassius.

Se saisissant de la première enveloppe de la pile, Crassius se bascula en arrière, faisant tenir sa lourde chaise sur ses deux pieds arrière uniquement. De ses doigts agiles, il défit le cachet, et lu avec attention. Dorian, encore. De quand datait leur dernier échange de lettres ?

Les mots de sa réponse coulèrent avec naturel. Il ouvrit son cœur, se fit sincère et spontané.





T
rès cher Ser Pavus,


Ta lettre m'a cette fois-ci retrouvé alors que je rentrais à Minrathie.

Je n'étais pas bien loin, seulement enfoncé dans le sud du viridis, à explorer d'anciennes ruines elfes datant d'avant la naissance même de notre empire. Des ruines encore inexplorées par l'Homme, tu imagines ?
Dans une pièce dont la porte avait été scellé par des briques, nous avons découvert trois corps momifiés. Le premier était allongé sur une sorte de lit de pierre, habillé richement et paré de beaux atours. Son visage était paisible, presque comme s'il dormait. Plus loin contre l'un des quatre murs de cette chambre mortuaire, un autre corps, recroquevillé sur lui-même, les mains figées autour de son visage, comme s'il avait essayé de se l'arracher dans ses derniers moments. Et enfin, le troisième mort, penché sur le lit du premier, ses traits desséchés semblaient profondément tristes.
Nous avions pénétré dans une chambre servant au Uthenera des elfes, cette pratique qui consistait à atteindre l'immortalité par le sommeil. Le pratiquant devait évidemment être l'elfe richement vêtu et allongé sur le lit. Quant aux deux autres, ils devaient avoir été désignés pour l'aider dans cette tâche. Évidemment, ce fut pour ces trois êtres un échec complet, au vu de l'état de leurs cadavres. Et une mort lente et douloureuse pour ces deux assistants.

Dorian, ce troisième corps me fait penser à toi.
Si ce que tu me dis est vrai, alors Felix est condamné, et Alexius déjà mort dans un sens. Il ne reste que toi. Toi qui peux encore sauver ta vie, reconnaître que tout le processus n'est pas viable. Tu es jeune, prometteur, ne te laisse pas mourir penché sur le lit d'un condamné.
La souillure de l’engeance est pour le moment incurable. De nombreux savants, dans tout Thédas, se penchent sur cette épineuse plaie depuis l'avènement du premier enclin. Et rien, ni personne, n'est encore parvenu à la moindre piste exploitable. Alexius doit en effet avoir perdu la tête, s'il pense avoir dépassé les limitations de nos ancêtres. Et s'il cherche une solution dans les magies interdites, je peux comprendre pourquoi tu es inquiet.
Dorian, je t'en prie, essaye encore une ou deux semaines, et puis tourne le dos. Cette histoire ne peut pas avoir de fin heureuse.

Quant à moi, je crois que je me lasse de Minrathie.
Toutes mes connaissances finissent par se marier, les unes après les autres, comme si elles succombaient elles aussi à une maladie hautement contagieuse. Bientôt, je n'aurais plus personne avec qui m'amuser. Alors, pourquoi rentrer ?
Je crois que je vais finir par accepter les missions plus longues que l'on me propose. Accepter de me soumettre plus longtemps à un seul magister, même si l'idée même continue de m'être déplaisante.

J'espère lire dans ta prochaine lettre de nouvelles de ton retour parmi les vivants l'ami, tu manques à beaucoup de monde par ici. Ulio te salue.
Servis. C.







Dim 29 Mar 2020 - 0:52

Dorian Pavus
Dorian Pavus

– Inquisition –

Messages : 322
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies

9:37 du Dragon
Feat. Crassius Servis
Fidèle correspondance - ☀ ☀ ☀ ☀


Une main sur mon épaule.

Alors que je sentis le frisson froid de la surprise parcourir mon corps, je réalisai que je m'étais endormi. Mon regard encore brumeux croisa celui d'Anah, qui m'avait trouvé effondré contre mon bureau de travail. Encore. Je soupirai tout en me frottant un oeil, tandis que la servante me tendit une lettre. Une lettre ? Je ne me souvenais pas avoir écrit à quiconque récemment ..

Curieux, je l'attrapai prudemment, la remerciant vaguement. Puis, je réalisai en me grattant la joue que je devais sérieusement songer à me raser un jour. Un jour. Mes sourcils se froncèrent de perplexité.

Qu'étais-je devenu, au coeur de ce chaos ? J'avais arrêté d'écrire à mes amis depuis un petit moment, je prenais de moins en moins de temps pour moi, je dormais de moins en moins. Je soufflai du nez, tandis que je reconnus l'écriture relativement propre de Servis. Servis m'écrivait .. à quand remontait notre dernier échange ?

Je lus avec attention chaque mot, conscient à travers son écriture qu'il n'allait pas si bien que ce qu'il prétendait. S'il se sentait autant mal à Minrathie, ce n'était pas bon signe. J'espérais sincèrement qu'il se portait mieux depuis.

Il me fallut cependant attendre le lendemain pour lui répondre, d'une part car j'étais bien trop épuisé, de l'autre car Anah m'avait très fortement recommandé de dormir cette nuit-là. Pour une fois, j'avais cédé ma fierté pour quelque chose de plus raisonnable, chose qui n'était pas arrivé depuis mon arrivée entre ces quatre murs.








Crassius,

J’ai pris ma décision, et je resterai. Félix est peut-être condamné, mais Alexius a besoin de quelqu’un à ses côtés.

Cela dit, je parviens à déceler dans les pleins et déliés de ta plume que tu n’es clairement pas au top de ta forme. J’espère que ça va mieux depuis le temps, je suis navré d’être autant irrégulier dans mes réponses.

Si tu veux un conseil d’ami, ne te noie pas trop dans ton travail, tu risques de finir comme moi. J’ai hâte qu’une conclusion s’approche, que je puisse partir, retrouver la civilisation. J’ai une certaine habitude à m’enfermer, que ce soit pour travailler, avoir un moment pour moi, ou que sais-je. Mais j’ai également une habitude de voir du monde, de me distraire, de boire jusqu’à n’en plus pouvoir.

Essaie maintenant, cher ami, de me visualiser dans mon état actuel, et je te garantis que tu ne le pourrais, à moins de le voir par toi-même. J’arrive à une étape où je commence à me faire peur, tant je suis radicalement différent de qui j’ai l’habitude d’être. Il y a des jours où j’oublie de me raser, de prendre soin de moi, voire même de dormir. Au niveau de mes nerfs, ils commencent à s’habituer à être à bout, constamment sous tension. Quelque part, c’est bien pour mon travail, mais ce n’est clairement pas rassurant.

Ce début de nouvelle année fut complexe à gérer, mais tu as eu raison sur un point essentiel dans ta précédente lettre : je n’ai pas à subir ce qui se passe. J’essaie de moins me laisser faire, de garder mes positions plus solides, de confronter un peu Alexius sur la situation.

Cela étant dit, je crois que tu t’es également mépris dans ta précédente lettre : Alexius est un homme honnête et bon, il ne s’abaissera jamais à user de magie interdite, et c’est bien quelque chose que j’admire chez lui. Si on prend en considération sa situation, la magie du sang ne semble qu’être un pari très risqué, mais qui reste bien mieux que de bêtement rester au pied du mur. Je n’encourage pas cette méthode, au contraire, mais de le voir tenir bon face à une tentation autant forte est une qualité fort admirable.

C’est pour ça que je ne peux pas l’abandonner à son triste sort maintenant, Crass. Il n’est pas encore totalement perdu, et il a besoin de moi auprès de lui. C’est certes difficile à gérer, mais j’y crois.

Mais Andrasté, prends soin de toi un minimum, et ne laisse pas trop ton travail te consumer, aussi palpitant doit-il être à tes yeux. J’espère que l’on pourra se revoir un jour, car je dois dire que ta présence me manque énormément. Je suis désolé de ne pas pouvoir répondre plus vite, ou mieux, j’essaie déjà de répondre aux lettres, et avoir encore la force et la conviction d’y arriver est une belle satisfaction à mes yeux.

Et je sais que je ne suis pas le plus présent dans ta vie en ce moment, mon ami, mais si tu as besoin de parler de quoi que ce soit, n’hésite pas. Je tâcherai d’y répondre le plus rapidement possible.

J’attends ce jour où l’on se retrouvera dans une taverne pour y savourer un bon vin, rien que toi et moi.

Prends soin de toi, l’ami.


D. Pavus


Dim 29 Mar 2020 - 10:21

Anonymous
Invité

Invité


[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]
Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies.


Fourbu et passablement irrité, Servi claqua la porte de sa chambre sitôt passée. Il venait d'effectuer, à pied, tout le trajet le conduisant aux quartiers les plus riches de Minrathie. Lorsqu'il s'était mis en route, le soleil brillait fièrement dans le ciel. À présent : sa chambre était plongée dans la pénombre. Il resta un instant immobile, avant de claquer des doigts par énervement. De ce simple mouvement de friction, il fit naître des flammes de l'immatériel. Il les laissa grandir, puisant dans le vent invisible de cette force inépuisable. Les flammes se détachèrent de sa paume, dansant autour de sa main, étirant des ombres impossibles sur la chambre. Cette chambre était devenue au fil des jours une véritable prison. Et Servis était prêt à tout pour s'en échapper.

Et si Servis avait passé une bonne partie de sa journée à arpenter les quartiers les plus riches de sa ville, c'était dans l'unique but de rencontrer des magisters, et de les convaincre de lui faire confiance. Dans le milieu de l'archéologie, il était difficile de se faire un nom. Que le chercheur soit talentueux et brillant n'importait finalement qu'assez peu : l'archéologie était une science d'échec. Il fallait creuser, chercher, prier même pour avoir la chance de déterrer quelque chose. Et il fallait invoquer un miracle pour faire remonter à la surface une découverte digne d’intérêt. Au fil de ses entrevues, Servis en étaient arrivés à une douloureuse conclusion : Minrathie changeait. Il flottait sur la ville un climat constant de tensions réprimées. On attendait la guerre. On s'apprêtait à chaque instant à faire sauter le pont reliant l’immense ville au continent pour subir un état de siège. Plus personne ne semblait s'intéresser au passé. Il n'avait essuyé que des refus.

Le mage projeta brusquement ses flammes en direction d'un chandelier suspendu à son plafond. Il soupira alors qu'une lueur plus domestique éclaira son petit univers. Il remarqua alors qu'une lettre avait été déposée sur son bureau en son absence. L'enveloppe scellée contrastait fortement au milieu des brouillons de lettres et de Cv qu'il avait prévu d'envoyer aux quatre coins de Thédas, avant d'être contraint de financer lui-même ses propres expéditions.

Il prit place sur le siège molletonné de son bureau, et parcourut hâtivement les lignes écrites par la main de Dorian. Ces mots le touchèrent plus qu'ils ne l'auraient dû, faisant malheureusement écho aux nombreux échecs de ces derniers jours.

Servis était un homme brisé, au moment d'empoigner sa plume.





D
orian,

Je ne parviens pas à comprendre ta décision. Mais il me semble également évident qu'il t'es impossible d’appréhender correctement ma façon de vivre.

Mon travail n'est pas simplement une occupation : il est ce qui me pousse à me lever le matin, ou plus précisément à aller me coucher le soir. En un mot comme en mille : il est mon unique raison de vivre.
Mais comment pourrais-tu comprendre ça, toi ? Dès ta naissance, tu avais un but clair et précis. Celui d'être le fils de ton père, et de poursuivre après lui l'oeuvre grandiose de tes ancêtres.
Moi ? Je ne suis rien. Mon nom lui-même n'est-il pas assez équivoque ?

Mais en dehors, les mains dans la terre, dans la poussière et dans le sable, les mains dans la boue ou dans la pierre, à remuer l'or ou les os, je suis enfin quelqu'un. J'ai enfin un but. Sans ce travail, je ne suis qu'une coquille vide.
Alors oui, je ne vais pas bien.

Je réalise aujourd'hui que je dois faire un choix. Couper réellement les ponts avec ma vie de Citadin et embrasser enfin véritablement la carrière où je me dessine jusqu'à présent timidement. Je ne crois pas en être capable. Je ne suis pas du genre à renoncer. Je n'aime pas perdre. Je ne peux pas perdre, sinon comment l'histoire se souviendra-t-elle de mon nom ?
Mes os peuvent se briser, mes organes peuvent contracter mille maladies, jamais je ne perdrais cette flamme qui m'habite. Même si pour cela je dois en souffrir.

Je souffre Dorian. Je souffre d'écrire ces mots, de ressentir contre toi cette colère. Je souffre également de t'imaginer, là où tu es, et d'assister à ta déconstruction méthodique.

Tu as bon cœur Dorian, et c'est bien là le pire de tout tes défauts.
J'ai peur qu'un jour tu te rende parfaitement aveugle aux loups qui t’entourent.

Servis.

P.s. j’aimerais un jour avoir le courage d’entamer une longue conversation avec toi au sujet des magies interdites. Je pense que la religion et la politique ont rendus  les mages timorés et pire, qu’elle fait croire à tous qu’il existe des forces obscures, alors qu’en réalité seuls les Hommes ont le cœur sombre. Alors l’ami, s’il te plaît : ne te laisse pas dépérir avant que nous puissions avoir cette conversation, tu veux bien ? J’aimerais avoir encore une fois l’occasion de me disputer avec toi.







Mer 29 Avr 2020 - 21:50

Dorian Pavus
Dorian Pavus

– Inquisition –

Messages : 322
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image]

Le progrès n'est que l'accomplissement des utopies

9:37 du Dragon
Feat. Crassius Servis
Fidèle correspondance - ☀ ☀ ☀ ☀


Félix dormait enfin. Son sommeil avait été relativement agité durant cette nuit. Mais il dormait enfin, et c'était un soulagement.

Je retournai à mon bureau - que j'avais installé dans sa chambre depuis le temps. Le regard plongé dans mes paperasses les plus diverses, je retrouvai une lettre à laquelle je n'avais pas répondu encore, et qui avait une fois de plus toute mon attention. Mais il n'y avait rien à faire : la colère s'empara à nouveau de mon corps, rien qu'à la lecture de ses mots. J'étais l'ignorant ? Il lui faudrait décidément un miroir !

Mais malgré tout, cette lettre me fit longuement réfléchir. Qu'avais-je sacrifié au nom de la thaumaturgie ? Au nom d'Alexius ? Etais-je réellement satisfait de la vie que je menais ? N'était-il pas tant de quitter le navire ?

Ma frustration descendit à mesure que mon clair regard effleurait chaque lettre de son écriture toujours plus maladroite. Servis avait besoin d'aide. Andrasté savait dans quelle solitude il devait être plongé dernièrement.

Je saisis finalement ma plume, réfléchissant à l'ordre de mes mots. Je retrouvai la lettre que j'avais débuté sous le joug de la colère, mais décidai malgré tout de la poursuivre. Je ne dormirais pas tant que cette lettre ne serait pas cachetée et prête à partir.








Crassius, mon pauvre Crassius,

Suis-je censé te prendre en pitié, ou suis-je censé me foutre de ta gueule ? Ou peut-être que c’est toi qui te fous de ma gueule, après tout.

Penses-tu que la vie d’Altus est amusante ? une simple promenade de santé où l’on peut aller là où il nous semble bon d’aller ? Je vais me briser les côtes à force de rire. Être un Altus, Crassius, c’est ne pas choisir sa vie du début à la fin. C’est être fiancé dès la naissance au nom d’alliances absurdes. C’est ne pas pouvoir choisir la façon de se lever, de respirer, de penser, de baiser, de marcher. Et heureusement pour moi, je l’ai compris très tôt, c’est pour ces raisons que je ne rentre plus chez moi, que j’évite mes parents - qui, au passage, ne se sont jamais réellement préoccupé de moi, si ce n’est au nom de cette “grandiose destinée” dont tout le monde parle -, que j’évite ce qui est censé être ma belle-famille, que je me terre constamment dans les bas-fonds pour vivre ma propre vie. Et si tu veux une vérité quasiment absolue, je suis un homme mort aux yeux de tout le monde si ce que mes amis - et véritables proches - voient sont connus de tous, dans l’Empire. Et évidemment, qui dit vie scandaleuse dit diffamation sur un nom dont la destinée m’importe peu.

Cette société me donne déjà suffisamment la gerbe, alors n’en rajoute pas davantage en m’accusant de ce que je n’ai pas fait, ou de choses sur lesquelles je n’ai aucune emprise.

C’est si important que ça de t’oublier en tant qu’individu, simplement pour gravir l’échelle sociale ? C’est si important que ça de te tuer au travail simplement parce que tu as cette impression de vide en toi ? Tu fais ce que tu veux, du moment que c’est ce que tu veux vraiment, et que tu ne t’oublies pas dans le tas. Mais j’ai l’intuition que ta vision des choses te mène droit dans le mur.

Si tu n’étais rien, Crassius, je ne serais pas ton ami. Je me fiche que tu utilises mon nom pour te faire une réputation, je me fiche que tu te serves de moi pour grimper. Si tu te le demandes, évidemment que j’ai remarqué ces petites futilités, mais je n’en ai rien à foutre. On est amis, et tu as un bon fond, Crass. Tu as tellement de bonnes valeurs, de qualités comme de défauts qui te constituent, et ça me fait cruellement mal de lire que tu te sens vide, que tu as l’impression de n’être rien. Car tu es tellement plus que la bonne plupart de ceux auxquels tu aspires à ressembler. Le monde Altus est dangereux, et il se pourrait bien que tu y perdes ton coeur en or, si tu t’entoures des mauvaises personnes. Les Altus sont des charognards, ils sont déjà sans pitié entre eux, alors imagine avec une âme pure comme toi.

Je ne t’aiguillerai pas dans ton choix à faire, car il n’y a que toi pour le savoir ; je souhaite simplement que tu ne t’oublies pas au coeur de tes ambitions qui me semblent de plus en plus démesurées. Garde les pieds sur terre un minimum, et promets-moi que tu le feras. Si tu dois prendre du recul de la vie citadine pour réaliser quoi que ce soit vis-à-vis de toi-même, fais-le. Si tu dois faire une grande pause de tout, tout comme de nous, fais-le, mais prends soin de toi. Je t’ai souvent dit que je serai là pour t’aider, et je le pense toujours. Tu es quelqu’un de bien Crass, avec un bon fond.

Et tu te méprends quant à mon incompréhension de ta décision : j’ai dû faire des choix difficiles également au nom de la thaumaturgie. Ce domaine a donné un réel sens à ma vie. Alexius a donné un sens à ma vie. C’est le pourquoi je me dois de tout tenter pour lui redonner un but à la sienne. Tu parlais d’une flamme impossible à éteindre ; eh bien, je possède cette même flamme, même si elle s’éteint progressivement au fil du temps qui passe. J’ai une dette envers cette famille qui dépasse ton entendement, je conçois : mais je ne lâcherai pas, aussi éprouvant cela s’avère.

J’attendrai cette conversation avec toi, et je te souhaite de comprendre que ces magies interdites restent omniprésentes malgré tout, et que ce “coeur sombre des Hommes” est la cause principale de son utilisation démesurée et quasi constante. Ces magies n’apportent que la destruction et le chaos. Ne sombre pas dans cette voie-là, je t’en conjure.

Mais au moins, même si nous nous prendrons grandement la tête sur le sujet, je pourrai te revoir. Tu n’imagines pas à quel point ça me manque, ces verres de vin avec toi, ces soirées dansantes où je te vois gesticuler dans tous les sens, tes maladresses comme tes traits d’humour si typiques. Même ton côté tactile me manque, Crass. J’attends donc ce jour avec impatience, et quelque chose me dit qu’il ne saurait tarder : je vais essayer de confronter une dernière fois Alexius, et celle-ci sera la dernière, la décisive.

Je te retrouverai à Minrathie, mon ami.


D. Pavus


Contenu sponsorisé


Page 1 sur 2 1, 2  Suivant

Permission de ce forum:

Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum