[Flashback 9:35] Dédale fleuri et boussole humaine [PV Crassius Servis]

Fragnar fut soudain un peu plus hésitant lorsque Servis lui rappela que le jardin risquait d’être abîmé pour un amusement passager. Mais après tout, les plantes repousseraient ; une occasion comme celle-ci, en revanche, ne se représenterait sans doute pas. Et l’agacement qu’il ressentait encore envers les deux demoiselles parasitait son amour pour les plantes. Elles lui avaient rappelé Jarvia, elles l’avaient mis mal à l’aise. Il voulait voir leur visage se décomposer, se déformer sous la colère.

Pour une fois, c’était lui qui était en position de pouvoir et cela avait quelque chose de grisant.Il vint alors déposer le chaton dans les bras tendus de son camarade, le décrochant au passage de son avant-bras qui saignait légèrement. Il dédaigna la blessure en haussant les épaules, puis sourit en observant la petite boule de poils renifler l’humain avant de ronronner contre lui. L’animal semblait l’avoir aussi adopté. Il sortit ensuite sa dague, la faisant tourner entre ses doigts en se baissant pour couper la corde.Il releva la tête, haussa un sourcil, alors qu’il se retenait de soupirer au sous-entendu. Peut-être que leurs yeux de biche auraient eu un effet sur lui, s’il n’était pas de si mauvaise humeur et s’il n’avait jamais été voleur. Elles avaient fait un pari, elles avaient perdu ; si elles n’étaient pas prêtes à perdre à tout instant ce qu’elles venaient de gagner, alors elles avaient encore à apprendre.Il se mordit la langue aussitôt. Par habitude, il avait utilisé « nous » au lieu d’un pronom plus neutre. Il sous-entendait ainsi qu’il avait fait partie de ceux qui pouvaient être ainsi puni. Même s’il ne comptait pas cacher à Crassius la vérité, il aurait voulu la dire autrement. Nerveusement, il frotta son tatouage de paria du pouce, avant de couper la laisse du ghast sous le regard noir de ses propriétaires.

L’animal glapit, avant de bondir loin de lui, courant sur l’allée où ils étaient. Fragnar rangea son arme avec un rire clair, alors que des cris effrayés, des insultes et des imprécations ponctuaient le parcours de la créature. Il souhaitait bonne chance aux gardes pour l’attraper, ils en baveraient, si même ils y arrivaient.

Tout en continuant de rire, il s’inclina moqueusement devant les deux voleuses, n’arrivant pas à masquer son sourire.Il se tourna ensuite vers Servis, frottant de son pouce son tatouage. Comment aborderait-il le sujet qui lui tenait à cœur ? Ou même, de quoi discutaient-ils déjà, avant que les deux femmes ne les abordent ? Il ne s’en souvenait guère. Son sourire se transforma en grimace gênée.Il n’était pas certain d’avoir le droit d’appeler Servis ainsi, mais il se sentait presque pousser des ailes après cet acte, aussi insignifiant fût-il. Cela lui semblait être une éternité depuis qu’il avait pu décider quelque chose sans aucune influence extérieure.


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Fragnar parle en #e9383f

Fragnar esquissa un sourire sincère, encore sous l’euphorie de son geste qui lui donnait l’impression de flotter. Voilà quelque chose qu’il raconterait sans doute à Solveig pour rire avec elle, loin des oreilles de son oncle tout de même. Mieux valait qu’il ne fût pas associé à l’incident, ce pourquoi il hocha vivement la tête à la proposition de Servis.Tout en subtilité, il amenait petit à petit le sujet du Carta sur la table, avec une finesse dont Gerrand serait sans nul doute fier. Il suivit le mage, remarquant au passage qu’il réduisait ses foulée pour qu’il arrivât à le suivre. Il retint tant bien que mal un sourire à cette observation qui le rendait sans doute plus heureux qu’elle ne l’aurait dû.

C’était même stupide, mais il se sentait joyeux a l’idée d’avoir trouvé un ami par le hasard le plus total, dans cette ville immense. Il en remerciait la Pierre, d’autant plus si Servis ne s’effarouchait pas de son ancienne appartenance. D’ailleurs, ce dernier lui rendit le chaton et Fragnar le gratouilla entre les deux oreilles, se concentrant à moitié sur les paroles du mage.

Il aurait presque pu se sentir sur un nuage lorsque l’humain le nomma « camarade », mais le restant de sa phrase ramenait avec elle le rire de Jarvia et sa voix ricaneuse qui lui chuchotait que Crassius changerait de ton dès qu’il saurait la vérité. Mais il ne voulait pas l’écouter. Il ne voulait pas laisser une morte influencer sa nouvelle vie.

Jarvia était décédée dans les Taudis d’Orzammar, alors que Fragnar vivait désormais dans la brillante Minrathie.Machinalement, il passa une main sur sa gorge, maintenant le chaton contre lui alors que le froid saisissait ses membres. Il pouvait encore sentir le fil de la lame de Jarvia sur sa peau, comme un fantôme du passé dont il ne s’était pas débarrassé.Ça y était, il avait lâché l’information. Il recommença à gratouiller le chat contre son torse, appréhendant la réaction de Servis. Il lui coula un regard en coin, essayant de garder une respiration stable alors qu’il craignait le rejet de son camarade.Il gratta sa marque de paria, même si ce n’était pas vraiment ce à quoi il pensait. Il y avait le poids invisible de Jarvia sur son âme, qu’il tentait désormais d’ignorer pour avancer.


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Fragnar cligna des yeux alors que Servis le poussait à en dire plus, sans prendre la fuite. Il lui coula un regard en coin, suspicieux, avant de prendre une inspiration pour se calmer. Le mage avait déjà montré qu’il flirtait avec les limites de la légalité depuis tout à l’heure ; un homme plus à cheval sur les lois ne l’aurait pas laissé dépouiller les deux arnaqueuses, encore moins mettre le bordel en ville en relâchant le ghast. Il ne l’avait pas arrêté et il n’était pas parti non plus. Il pouvait bien lui accorder un peu plus de confiance.Il songea qu’il aurait pu faire partie de ceux qui avaient trépassé sous la lame de Finduilas, si son oncle ne l’avait pas récupéré avant. Il aurait pu être un de ces criminels retournés à la pierre pour le simple crime d’avoir voulu survivre. Les Taudis ne laissaient le choix à personne ; soit rejoindre le Carta et vivre, soit mendier et mourir.Fragnar avait été jeté dedans sans ménagement, gosse perdu et sans ressources. Il avait servi d’avertissement, et seul son talent naissant en enchantements au fil des années l’avait épargné de la mort, que ce soit aux mains d’un garde ou de Jarvia dont il était le souffre-douleur.

Il en avait voulu à ses parents de ne pas avoir cédé à Berath et Jarvia. Mieux valait payer une rente que mourir ou être réduit au rang de Paria. Mais il avait grandi, il avait compris que ses parents n’avaient pas imaginé qu’ils mettraient effectivement leurs menaces à exécution. La famille Meras avait toujours été respectée  à Orzammar, jamais ils n’auraient pu se sentir réellement menacés. Si seulement Berath avait choisi une autre famille comme première victime, si seulement.Combien de fois était-il passé aux portes de la mort, parce qu’il se faisait surprendre en plein vol, parce qu’il courrait trop lentement ? Il avait eu beaucoup de chance dans son malheur, même s’il préférait actuellement se trancher la gorge que retomber entre les mains de Jarvia si elle avait survécu. Il n’était pas certain de pouvoir encore le supporter.

Les coups, il pourrait les endurer de nouveau, c’était presque s’il ne s’en fichait pas. Mais elle avait une emprise sur ses pensées terrifiantes alors même qu’elle était morte. À force de le rabaisser, de lui susurrer ses mots empoisonnés, elle avait enfoncé ses doigts froids dans son cœur et il ne s’en débarrasserait sûrement pas tant qu’il respirerait encore.Jamais il ne pourrait remercier assez Guerrand pour cela. Il l’avait sorti des Taudis, de la poussière et de la boue, pour le ramener à la lumière du soleil. Il devait avouer qu’il avait été à la fois terrifié et fasciné par la Surface. Le voyage avait été long, mais ses yeux avaient brillé pour la première fois depuis des années, et il ne parlait même pas de sa joie devant Minrathie la blanche, Minrathie la belle.

Et il avait découvert la beauté éphémère des fleurs, de ces corolles multicolores qui s’ouvraient pour s’épanouir au soleil.

Il gratouilla entre les deux oreilles le chaton qui ronronnait contre sa poitrine pour l’apaiser, en remerciement. La petite boule de fourrure noire était des plus adorables. Fragnar avait bien l’intention de prendre soin de ce chat ; peut-être son oncle râlerait-il, mais il lui faisait bien trop penser à lui pour le laisser à la rue.Il termina ainsi, jetant un regard à son camarade. Il y avait comme un poids en moins sur ses épaules. Il n’avait pas l’impression qu’il le blâmerait, il n’y avait aucune raison. Il avait eu mille et une occasions de partir ; il aurait même pu l’abandonner dès qu’il avait mentionné le Carta, mais non. Le nain envoyait valser sa méfiance et les propos sournois qui prenaient la voix de Jarvia.

Juste pour Servis, il voulait espérer plutôt que craindre.


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Fragnar parle en #e9383f