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Lun 21 Déc 2020 - 15:50

Théodore Camillus
Théodore Camillus

 

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Un passage en quartier Laetan
feat. Crassius Servis
9:38, 6 Réalduc

Le mois dernier, Théodore venait de fêter son dix-septième anniversaire. Outre les habituels « cadeaux » qu’il avait reçus en cette occasion – des livres et quelques partitions de flûte –, cette fois-ci, Jehan avait réussi à lui dégotter de nouveaux bocaux pour y ranger les plantes désormais séchées qui s’accumulaient dans sa chambre. Il en avait bien besoin : les domestiques qui rangeaient sa chambre lorsqu’il n’y était pas – et contre sa volonté – mettaient le désordre à chaque fois. Vous vous imaginez, passez des heures chaque soir à classer les plantes en train de sécher ? Et à remarquer en passant que certaines plantes étaient parties à la poubelle ? Avec des bocaux en plus, toutes ces mauvaises surprises n’étaient plus, puisque les plantes restaient bien sagement dans les pots.

Et puis, tous ses livres et ses lettres ne se retrouvaient plus autant envahi par les plantes. Surtout ses lettres, finalement, puisque Théo put ranger sans encombre la lettre de Crassius venait de lui envoyer, disant qu’il avait urgemment besoin de ses services d’apothicaire. Théo ne se posa pas plus de questions quant au pourquoi de cette demande, et prépara aussitôt la trousse de médecine d’urgence contenant des bandages, de l’elfidée, et autres remèdes d’urgence. Il se permit d’ajouter quelques-unes de ces plantes nouvellement mises en bocaux, lui permettant d’avoir dans sa sacoche un peu de tout. Dans quelle situation le patient était-il ? Théo ne le savait pas encore, mais mieux valait d’être prévoyant que pas assez.

La sacoche d’une main, il fonça rapidement vers les rues de Minrathie, n’oubliant pas de signaler à Jehan que Crassius l’avait demandé. Bizarrement, dès que Crassius était mentionné, Cornelia était un peu moins regardante, donc Jehan l’était également moins de facto. Théo put donc facilement sortir de la résidence Camillus sans que Jehan ne soit pas loin derrière – pour une fois.

L’adresse indiquée par l’homme aux doudous se situait dans le quartier Laetan. Ne connaissant pas bien cette région de Minrathie, Théo tourna en rond quelques bonnes minutes avant de trouver le bon bâtiment. C’était sans doute le bâtiment l’un des plus beaux de tout de quartier Laetan. Ce fait troubla tellement Théo qu’il vérifia par trois fois s’il se trouvait bien au bon endroit. C’était sûr que ça changeait grandement du quartier Soporati qu’il avait l’habitude de sillonner depuis quelque temps déjà pour soigner les gens.

Théo toqua à la porte.

Jeu 24 Déc 2020 - 8:32

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Un passage en quartier Laetan.



9:38, 6 Réalduc. Appartements d'Ulio Lucanus.

“Idiot !„
“Calme-toi.„
“Idiot, idiot idiot !„

Elle traversa la pièce et se jeta une nouvelle fois sur lui, assenant plusieurs coups de son poing serré contre son buste. Contre ses côtes, juste sous sa clavicule gauche, visant inconsciemment son cœur. Il ne réagit pas et l’épaisseur de ses vêtements absorba la majorité du choc, étouffant même jusqu’au son.  Servis, debout de l’autre côté de la pièce, secoua la tête gravement.
“Cela ne sert à rien.„
“Peut-être, mais moi ça me fait du bien !„

Elle se redressa, croisa les bras sous sa poitrine, et se mit à faire les cent pas. Lorsqu’elle passa à portée, Servis l’attrapa et l’attira à lui, l’emprisonnant au creux de ses bras. Un geste plus pratique que tendre.
“Arrête un peu de bouger, tu me donnes le tournis.„
“Tu n’es pas anxieux toi ? Pas même un petit peu ?„
“Si, mais nous ne pouvons plus rien faire, à part attendre.„

Tout en parlant il laissa dériver son regard sur le lit occupant le centre de la pièce. Il détailla vaguement la silhouette qui y était allongée tout habillé puis, alors que les contours des bandages imbibés de sang commençaient à se faire nets, il s’intéressa plutôt à la pièce en elle-même.

Il avait toujours trouvé les appartements d’Ulio somptueux. Si toutes les pièces étaient décorées avec goût, ravalées mêmes lorsque les modes changeaient, la chambre restait de loin la plus spectaculaire. Et quoi de plus normale, puisqu’il s’y déroulait de très nombreuses soirées, sauteries, réunions, … En un mot elle était le cœur de ces appartements. Elle était spectaculaire de par ses colonnades en marbre sombres, ses tentures en lourd jacquard, sa succession de tapis recouvrant tout le sol, et jusqu’au mobilier en bois doré choisis et positionnée avec soin. Seul le positionnement du lit, en pièce maitresse au centre de la chambre, exposée à la fois aux regards et à toutes les suppositions, le laissait perplexe. Arrivant au Psyche en bois, dressé près de la fenêtre pour permettre, Servis se sentit étonnamment nostalgique. Sans Ulio, ces appartements semblaient avoir perdu de leur charme. Il secoua la tête une nouvelle fois, vivement. Ulio n’était pas mort, pas encore. Il agonisait, tout habillé sur son lit...
Iovita parvint à s’écarter de lui. Elle ne s’éloigna pourtant que de deux pas, assez pour recouvrer sa liberté.
“Heureusement que tu l'as trouvé.„

Elle se retourna, le visage sombre, un regard assassin.
“Rassures-moi, tu n’étais pas avec lui quand…„
“Non. Comme toi je suis simplement passé le voir, et je l’ai trouvé dans cet état.„

Toujours fixé sur le Psyche, Servis pesa le poids de ses mots. Le poids de son mensonge, si nécessaire. Sa gorge se serra. Il commençait à ressentir le besoin de se retrouver seul. En se retournant vers Ulio, toujours aussi immobile qu’un marbre sur les draps de sa couche, il sentit une certaine colère entremêlée d’angoisse se nouer en son cœur. Colère, angoisse et urgence.
“Tu ferais mieux de rentrer Iovita. Fabius risquerait de te chercher, et je préférerais ne pas l’impliquer dans toute cette histoire. Évidemment je vais rester et surveiller son état en attendant que les secours arrivent.„

Elle secoua doucement la tête et s’avoua vaincue. Comme Servis elle ne souhaitait pas accabler son mari en l’entraînant dans cette sombre histoire. Fabius avait l’âme trop pure, trop droite, pour accepter qu’une de ses connaissances puisse ne serait-ce que songer à la magie du sang… Alors la pratiquer …

Iovita renifla avant de s’approcher doucement du lit. Elle esquissa l’amorce d’un geste qui mourut avant d’arriver à terme. À la place, Servis l’entendit adresser à leur ami des adieux francs et peinés. Puis elle quitta la pièce, sans se retourner. Ses talons de bois frappèrent le sol avec régularité, puis la porte d’entrée claqua, marquant son départ définitif. Alors seulement il bougea, et son image se refléta dans le Psyche lui faisant à présent face. Sa tenue bariolée, rouge, jaune et noire, ses cheveux en bataille et ces cernes de plus en plus sombres sous ses yeux. Il s’assit au bord du lit, et tenta de resserrer les bandes de tissu lui enserrant les bras, un de chaque côté, tous deux à dix centimètres de ses poignets. Au-delà de ce garrot la peau d’Ulio était pâle et froide. Les plaies sur ses poignets d’un rouge sombre et obscène.
“Idiot !„

Siffla-t-il entre ses dents, avant de se relever et de venir se placer contre la fenêtre, priant – mais priant qui ? – pour que Théo soit déjà en route.
Il fut entendu – mais par qui – quelques minutes plus tard : depuis la fenêtre qu’il n’avait pas quittée, Servis eut le plaisir de reconnaître la silhouette fine de Théo, ce jeune garçon qu’il avait reconduit chez lui, bien des années auparavant et avec lequel il entretenait une relation cordiale. Après un dernier coup d’œil au patient, qui semblait stable au vu de sa respiration profonde et tranquille, il quitta la chambre, traversa le court corridor tout en longueur et dévala l’escalier de bois étroit menant au rez-de-chaussée et atteint la porte d’entrée au moment même où Théo y toquait.
“Théo, merci d’être venu si vite. Entre donc.„

Sans attendre plus, il guida son invité au travers du court corridor, puis le long de l'escalier. Ils parcoururent le couloir et Servis le fit passer dans la chambre majestueuse d'Ulio.

Dim 3 Jan 2021 - 19:24

Théodore Camillus
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Un passage en quartier Laetan
feat. Crassius Servis
9:38, 6 Réalduc

La porte s’ouvrit, laissant apparaître Crassius. Même allure, même prestance, il semblait que l’homme n’avait pas vraiment changé depuis la dernière fois que Théo l’avait vu. Seul son visage quelque peu assombri, la rapidité avec laquelle il avait fermé la porte derrière le Théo, trahissaient la véritable raison de la venue de Théo dans ce grand bâtiment. Si Jehan pouvait penser que Crassius avait voulu montrer à Théo des objets aussi vieux que les murs de la résidence Camillus, seul Théo savait qu’il était là pour une urgence médicale.

Et quelle urgence médicale ! A peine Théo avait-il franchit la porte de la chambre gigantesque qu’il vit, allongé sur le lit, une personne au teint balafre. Aussitôt, Théo se précipita à son chevet. C’était un homme, de la même tranche d’âge que Crassius. Un ami ? Cet ami était bien mal en point. Il y avait sur chaque poignet, en dessous du garrot qui enserrait les avant-bras de ce patient, une plaie propre et nette. Les deux blessures presque symétriques, était… plutôt profonde, et leurs positions étaient étranges pour être dû à une chute ou à un accident. Que lui était-il arrivé ?
J’aurais besoin de vin, ou de n’importe quelle autre boisson alcoolisée. Le plus alcoolisé possible.
Théo posa sa sacoche au pied du patient, sortant bandages, elfidées séchées, bocaux remplis de plantes, cataplasmes et onguents en tous genres. Il mit spécialement de côté un bocal contenant de la sève d’elfidée, pour accélérer la guérison de la plaie.
Des précédents médicaux à signaler ? Des intolérances alimentaires par exemple ?
Théo se détourna enfin du lit, balayant la pièce du regard, occultant sans le faire exprès la présence de Crassius. Elle était joliment décorée, très ornementée, mais… Il n’y avait toujours pas de bouteille de vin, ni d’un autre alcool quelconque. Les domestiques des Camillus étaient… doublement plus efficace, presque aussi rapide que les ombres : pour apporter les plats lors du dîner par exemple, on ne les remarquait presque pas.
« Vous le voulez vivant ou mort ? Apportez-moi cette bouteille d’alcool !
L'homme n'était-il pas suffisamment mal en point ? Pourquoi personne ne réagissait ?

Jeu 7 Jan 2021 - 17:54

Anonymous
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Au grand soulagement de Crassius, Théo se précipita sans plus de question au chevet d'Ulio. Après un examen rapide du patient, il exprimait déjà une première demande.
‌‌
“De l'alcool fort ?„

S'étonna Crassius avant de laisser échapper un léger rire pincé. Cette demande ne devrait pas être difficile à exaucer, surtout dans cette chambre qui, comme dit précedemment, recevait de nombreuses soirées. Ses yeux fins et bleus survolèrent un instant la pièce identifiant les trois cabinets de liqueurs possédés par Ulio. Vers laquelle de ces merveilles devait-il se diriger ? La petite armoire à vin, réfrigérée à l'aide d'une rune ? Le coffre à double font cachant une précieuse collection d'alcool de contrebande inventif ? Ou tout simplement vers le cabinet officiel contenant les alcools les plus simples, grossiers mêmes, mais foutrement efficaces ?
Théo, lui, ne semblait pas vouloir perdre la moindre seconde : il avait sortit une bonne part de son matériel, qu'il installait méthodiquement autour du patient. Ses gestes trahissaient une certaine habitude, pourtant quel âge avait-il à présent ? Seize ans, dix sept ans ?
“‌Je n'ai jamais été témoin de la moindre réaction d'intolérence de la part d'Ulio, et pourtant nous passions beaucoup de temps ensemble.„

Finalement, motivé par le souvenir de la dernière soirée à laquelle il avait lui-même participé, Crassius contourna le lit et se mit à genoux. Tâtonnant à l'aveugle, ses doigts finirent par heurter la surface froide d'une bouteille en verre. Après une nouvelle série d'effort il parvint à scène emparer et à l'extraire de sa cachette hasardeuse. Il se releva, tenant en main une belle bouteille de Tomberlin vieille réserve, qu'il avait lui-même poussé avec soin sous le lit, désireux de l'éloigner au maximum de son propre verre. Troublé devant la brusque attitude autoritaire du garçon, il haussa un sourcil :
“‌Si c'est aux domestiques que tu t'adresse ainsi, ils ne te répondront pas : je les ait congédiés, tous les deux.„

Ulio n'était pas à plaindre, non, mais sa fortune n'était pas encore assez conséquente pour lui permettre d'engager plus de personnel, ou d'acquérir plus d'esclaves. Les deux qu'il s'était offert lui semblaient loyales, mais Crassius ne pouvait se permettre le moindre doute. S'ils dénonçaient Ulio à qui que se soit, si Ulio était arrêté, Crassius craignait pour sa propre sécurité. Après les évènements de la journée, il était à présent parfaitement certain qu'Ulio ferait son maximum pour l'entraîner dans sa chute.
Il tendit la bouteille à Théo sans se défaire de sa mine grave.
“‌Théo, il faut que tu comprennes une chose : les blessures que tu vois là, et plus fortement la raison pour laquelle Ulio se retrouve blessé, sont sévèrement punis par la loi. C'est pour cette raison que je t'ai demandé de venir, au lieu de simplement porter mon ami chez un guérisseur.„

Crassius s'autorisa un mince sourire encourageant.
“‌Je ne voudrais pas que tu te sentes piégé. Alors si tu ne souhaite pas poursuivre, je comprendrais.„


Jeu 14 Jan 2021 - 14:49

Théodore Camillus
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Un passage en quartier Laetan
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Devant l’air consterné de Crassius, lui disant que les domestiques n’étaient pas dans la pièce, Théo baissa les yeux au sol en s’inclinant légèrement, voulant se faire pardonner pour son attitude. Il s’attendait à un sermon et à une punition, comme le ferait Cornelia, mais ni le sermon ni la punition ne vinrent : à la place, l’homme aux doudous lui tendit une bouteille d’alcool, du Tomberlin d’après l’étiquette. Théo sourit. Les domestiques ne se sentaient peut-être pas concernés par le sort de leur maître de maison, mais ce dernier semblait avoir de bons amis.

Sans cérémonie, Théo ouvrit la bouteille et posa le bouchon sur le lit. Il prit ensuite un morceau de bandage sur lequel il versa un peu de ce liquide, toute en écoutant Crassius parler. Les blessures de son patient auraient une origine « illégale », et Théo eut peur de faire quelconque conclusion. Certes, ces blessures n’étaient pas dues à une chute, mais plusieurs autres raisons pouvaient donner le même résultat… Et Théo se sentit très offensé lorsque Crassius lui proposa de ne pas soigner l’homme s’il craignait les conséquences légales des actes illégaux du patient. Comme pour lui démontrer le contraire, il posa la bouteille de Tomberlin au sol – la rebouchant au passage – et s’attela à nettoyer les plaies avec le tissu imbibé d’alcool.
Crassius. Je suis venu soigner un patient, je ne partirais pas avant de m’être acquitté de cette tâche. Quant à ces blessures… Un accident aurait pu difficilement le blesser à cet endroit et de cette manière, mais elles auraient pu toutes aussi bien être obtenu de façon très légale : une tentative de suicide…
Théo n’avait jamais été témoin de tentative de suicide – que le Créateur l’en préserve –, mais certains Altus semblaient très mal supporter tout ce que leurs parents attendaient d’eux. La dépression semblait être une maladie presque courante chez ces jeunes Altus, il ne serait donc pas étonnant que la dépression aille plus loin. Oh, les familles n’en parlaient pas, mais pour avoir malencontreusement écoutés quelques prières à la Chantrie et d’après l’avis de Jehan sur la question, les tentatives de suicide devaient ne pas être aussi rare qu’on ne le pensât chez les jeunes Altus.
Des punitions…
Quant aux punitions, les domestiques et les esclaves en subissaient – parfois de terrible –, mais Jehan aussi. Du moins, Théo le supposait. Il ne savait pas ce qu’il se passait parfois entre Charles et Jehan, mais nul doute que Jehan était puni, au vu des blessures qui apparaissaient sur ses bras à chaque fois qu’il en sortait. Charles et Cornelia ne semblaient pas aimer les punir en utilisant la magie, comme ils le faisaient avec les serviteurs.
C’est pourquoi je n’ai pas besoin de savoir ce qu’il s’est passé. Tant que je ne sais pas, je n’ai rien à craindre : j’ai beaucoup de possibilités qui feront tout à fait véridique si les autorités m’interrogent. Si je sais ce qu’il s’est passé, peu importe ce que je dis, ils sentiront le mensonge. Et puis peu importe ce que font les gens, ou encore qui ils sont, je les soigne. Tous, sans exceptions.
Joignant les paroles aux faits, Théo posa le tissu alcoolisé maintenant imbibé de sang sur le côté pour attraper le bocal contenant de la sève d’Elfidée. Il laissa couler ce précieux liquide sur les plaies afin qu’elles se guérissent plus vite.
À partir de son réveil, il devra légèrement modifier son alimentation jusqu’à qu’il se rétablisse. Il pourra toujours manger de la viande, du poisson, des fruits, des légumes, des céréales… Mais il devra éviter le thé, le café et l’alcool.
Théo rangea son bocal de sève d’Elfidée, puis sortit un sachet vide qu’il remplit de diverses plantes dont de l’ortie. Il donna ce sachet à Crassius.
En plus, il devra prendre ceci en tisane tous les jours. Lorsqu’il y en aura plus, fais-le moi savoir, je t’en donnerais à nouveau.
Son rétablissement peut prendre plusieurs semaines. Du moment qu’il se fatigue plus rapidement que d’habitude, qu’il a des migraines, ce genre de chose… Peu importe s’il dit se sentir bien, il ne sera pas complètement guéri. Donc, qu’il prenne la tisane, et qu’il n’ingurgite ni d’alcool, ni de thé, ni de café.
Théo fit une pause pour sortir un bocal contenant un mélange de graisse de cerf et de sèves végétales ainsi qu’un rouleau de tissu.
Jusqu’à que les plaies se referment, il faudra aussi changer les bandages régulièrement en n’oubliant surtout pas de nettoyer les blessures avec de l’alcool. Je te montre comment faire ?

Mar 19 Jan 2021 - 23:20

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Un passage en quartier Laetan.



À aucun moment Servis ne remarqua l’attitude que prit très brièvement le jeune Théo. Il se pencha subtilement, ferma les yeux prenant ainsi une posture soumise, en attente d’une punition qui ne viendrait jamais. Le mage, bien qu’étant l’aîné de cette pièce (à l’exclusion bien sûr d’Ulio, toujours inconscient dans son lit), bien qu’ayant (pour une qui lui échappait) la pleine confiance des Camillus, ne se serait jamais octroyé le droit d’adjuger une quelconque correction à Théo. L’idée ne lui serait jamais venue. Il considérait le jeune homme comme un ami, un camarade plutôt, avec lequel il avait partagé il y a déjà sept ans de cela, peut-être même plus, des moments de jeux où il lâcha totalement les brides de son imagination. Et puis de toute manière, il n’avait rien à reprocher à Théo. C’était un Altus, son supérieur selon les codes de leur société. Tout dans son éducation expliquait, justifiait même, sa brusque poussée d’autoritarisme glaciale et réflexe.

Crassius observa alors Théo verser du Tomberlin sur une compresse de tissus. Le précieux alcool, cuvée rare vieillie au fût cerclé de Lyrium, imbiba mollement le tissu. D’une seule main le jeune soignant referma la bouteille et la déposa au sol avant de venir tamponner les deux plaies de son patient de cette compresse hors de prix. Son jeune visage était chiffonné, comme perturbé, piqué au vif par quelque chose dans les paroles de Crassius. Théo était-il offusqué de se voir ainsi offrir une porte de sortie ? Ses mots, polis mais fermes, ne laissaient plus aucun doute à ce sujet.

Alors que Théo s’occupait des poignets de son ami, Crassius songea au suicide. Certes, les poignets entaillés d’Ulio pouvaient y faire songer, tout comme les cicatrices translucides qui les marquaient déjà en plusieurs endroits. Mais qui connaissait Ulio ne pouvait croire en une telle hypothèse. Ce type n’avait rien à envier aux géants, que leur appétit insatiable poussait à ravager Tevinter et une grande partie du Sud de Thédas. Personne n’était plus vivant que lui, il devait tout obtenir, tout gouter, tout posséder avant tout le monde. Sa vie n’était qu’une épuisante course en avant, qu’une éreintante compétition dont il s’abreuvait avec sauvagerie. Mais avec une indéniable classe aussi. On pouvait facilement aduler Ulio, ou profondément le repousser. Lui-même avait choisi de s’adorer. Et pourtant, cette nuit, dans cette éternelle course au pouvoir, il avait bien faillit se détruire.

Crassius reporta son regard perçant sur le jeune soignant, qui évoquait à présent une possible punition. Il fronça les sourcils : lui avait eu la chance de grandir dans l’indifférence la plus totale de ses deux parents, trop occupés à fonder tous leurs maigres espoirs en son frère aîné. Il avait donc joui d’une invraisemblable liberté, et n’avait jamais reçu la moindre punition. Les punitions n’étaient-elles d’ailleurs pas réservées aux esclaves ? Aux domestiques ou aux enfants ?

Enfin, Théo conclus : s’il ne connaissait pas la vérité se dissimulant maladroitement derrière les blessures d’Ulio, il s’en porterait pour le mieux. Crassius hocha gravement la tête : voilà qui était bien pensé. Il clôt alors définitivement l’idée même d’une porte de sortie. Théo, de toute manière, avait l’air déterminé :
“Je les soigne. Tous, sans exceptions.„

Que sa dévotion était noble à voir. Les gestes assurés du soignant traçaient une sorte de ballet autour du corps livide du malade. Un ballet aux pas précautionneux mais mécaniques. Les gestes d’un expert. Mais alors le jeune Théo fit un faux pas. Il déposa la compresse, maintenant imbibée d’un sang mêlé de Tomberlin à même le drap couvrant le somptueux lit d’Ulio. Un couvre-lit cousu de véritable fils d’or et dont, selon ses dires, la création avait nécessité plus de deux mois complets à une équipe de couseuses Nevarennes. Une merveille qu’il s’était offert à l’occasion de son mariage. Le jour maudit où Hécate devint sa femme.

Insensible aux tourments subis par ce pauvre couvre-lit, Théo s’empara d’un nouveau bocal, contenant cette fois-ci une sève claire et souple, probablement de l’elfidée. Il en fit délicatement couler sur les plaies d’Ulio. Le ballet des gestes maîtrisés du jeune Théo ne s’arrêtaient pas. Couche après couche, soin après soin, il s’attelait avec le plus grand sérieux à la guérison de ses plaies. D’une voix neutre et concentrée, il énuméra de nombreux conseils, ordonnance d’une bonne guérison. Manger de la viande, du poisson et des légumes. Arrêter le thé, le café… L’alcool ?

Crassius ne put retenir son rire. Imaginer Ulio sobre lui était quasiment impossible. Cette chambre et ses mille trésors alcoolisés en témoignaient largement.
Sobre, le géant en lui laisserait alors éclater toute sa sauvagerie bestiale, il n'y aurait alors plus rien de charmant en lui. Sobre, il perdrait certainement ce brin d'accent qui ralentissait ses phrases, cette langueur paresseuse qui alongeait ses gestes. Sobre ou mort. Sobre ou pâle et inconscient. Le choix semblait impossible. Indifférent aux gourmands que ses recommandations avaient provoqués, Théo rangea son bocal de sève d'elfidée et continua son ballet, emplissant un sachet de nombreuses plantes que Crassius, bien trop perturbé, ne reconnu pas. Il était trop distrait, comme extérieur à présent à ce ballet trop long. Pourtant il tends la main et se saisit du sachet, des plantes qu'il ne reconnaît pas, et accueille le nouveau conseil d'un vague mouvement de tête.

Mais Théo n'en avait toujours pas fini. Habitué des mages de soins, Crassius réalisait à peine à quel point se devait être dur pour les soporati d'accéder à des soins. Étant membre de l'Académie de Minrathie, Crassius avait accès aux services de ses collègues. Ses plaies étaient refermées en moins de temps qu'il n'en fallait pour dérouler une bande de tissus. Et lorsqu'il était sur le terrain, Crassius évitait au maximum de se blesser. Il possédait une solide constitution qui lui permettait toujours de s'en sortir, et devant les soins que recevait Ulio, il s'en ressentait chanceux.
“Je te montre comment faire ?„
“Je crains que ça ne soit inutile Théo. Je ne serais pas celui qui prendra en charge la guérison d’Ulio. Il vaudrait mieux pour moi que je ne sois plus là lorsqu'il reprendra connaissance.„

Tristement, Crassius promena son regard sur l'entièreté de la pièce, lourdement conscient d'y mettre les pieds pour la dernière fois. Voulant au plus vite oublier cette désagréable sensation de page à tourner, le mage s'efforça à se concentrer de nouveau sur le présent, sur l'hôte poli et serviable qu'il avait fait venir.
“Mais dis-moi Théo, où as-tu trouvé toutes ces plantes et ces préparations ? Comment t'es tu formé à l'écart des soins ?„




Mer 27 Jan 2021 - 18:16

Théodore Camillus
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Théo soupira, presque dépité, lorsque Crassius éclata de rire à la mention du fait que le patient devrait arrêter l’alcool un moment, le temps de son rétablissement : qu’est-ce qui n’allait pas avec ce conseil ? C’était très sérieux, ça pourrait engendrer des problèmes lors de sa guérison ! Peut-être que finalement, le patient n’avait pas de si bons amis que ça. Peut-être que Crassius n’était pas un bon ami envers le patient ? Théo repoussa cette pensée jusqu’à la reprise de parole de l’homme aux doudous : il ne serait pas celui qui veillerait au rétablissement de l’homme allongé dans le lit, il ne le verrait pas non plus à son réveil. Théo fixa Crassius, circonspect. Un ami, un collègue, viserait son camarade malade régulièrement pour prendre des nouvelles. Quelle était donc la relation entre ces deux hommes ?  
Pas de problème. Je m’en charge moi-même cette fois-ci alors.
Ses gestes suivirent ses mots, et Théo enduisit le tissu du mélange de graisse et de sèves végétales. Où trouvait-il les plantes et les préparations ? Comment s’était-il formé aux soins ? Les questions de Crassius, bien que légitime, le fit soudain se demander s’il n’y avait pas des gens écoutant derrière les portes et les murs. Il balaya rapidement la pièce des yeux, confirmant qu’il n’y avait que Crassius, le patient ainsi que lui dans la pièce, et le patient, sans doute dans le coma, était dans l’impossibilité d’écouter la conversation.
Tu ne te rappelles pas ? Tu ne l’as pas vu lorsque tu as rendu visite à mes parents ? Papa est apothicaire, et non seulement il préparait des remèdes, mais il les fabriquait. Maman et moi, on l’aidait à la boutique. On peut dire que j’ai appris à concocter les remèdes avant de marcher. Papa avait un livre avec des remèdes, le seul livre dans toute la maison et sans doute l’objet le plus cher que nous possédions. J’ai appris à lire avec ce livre. Je le lisais tout le temps. Je le connaissais par cœur à force, avant d’arriver chez les Camillus.
Théo prit soin à ne pas parler trop fort, ne voulant pas que des oreilles indiscrètes ne capte sa conversation avec Crassius. En même temps, il banda soigneusement le poignet droit du patient, avant de faire de même avec l’autre poignet. Il était plutôt habitué à faire cela, et les gestes de Théo trahissait sans doute encore une certaine habitude.
Depuis que je suis chez père et mère, je peux acheter quelques livres sur la médecine, l’apothicairerie, les plantes… J’en trouve d’ailleurs facilement dans les rues de Minrathie et dans la cuisine de la résidence Camillus. J’ai aussi quelques pots de plantes dans ma chambre. J’en achète aux marchés également. Ce n’est pas difficile d’en trouver.
Théo s’était de nouveau autorisé à parler normalement. Dans ses paroles, si « papa » et « maman » désignaient ses vrais parents biologiques, les termes « pères » et « mères » correspondaient respectivement à Ambroise et Cornelia. Théo n’avait pas tout révélé, surtout le fait qu’il était plus ou moins le « guérisseur attitré » à Jehan lorsque ce dernier sortait de ses rencontres désastreuses avec son propre père, les avant-bras ensanglantés. De ce fait, Cornelia semblait tolérée d’une certaine manière le passe-temps de Théo pour la médecine et l’apothicairerie.
Est-ce vraiment si étrange de s’intéresser à ce domaine ?

Lun 1 Fév 2021 - 18:46

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À aucun moment Servis ne remarqua l’attitude que prit très brièvement le jeune Théo. Il se pencha subtilement, ferma les yeux prenant ainsi une posture soumise, en attente d’une punition qui ne viendrait jamais. Le mage, bien qu’étant l’aîné de cette pièce (à l’exclusion bien sûr d’Ulio, toujours inconscient dans son lit), bien qu’ayant (pour une qui lui échappait) la pleine confiance des Camillus, ne se serait jamais octroyé le droit d’adjuger une quelconque correction à Théo. L’idée ne lui serait jamais venue. Il considérait le jeune homme comme un ami, un camarade plutôt, avec lequel il avait partagé il y a déjà sept ans de cela, peut-être même plus, des moments de jeux où il lâcha totalement les brides de son imagination. Et puis de toute manière, il n’avait rien à reprocher à Théo. C’était un Altus, son supérieur selon les codes de leur société. Tout dans son éducation expliquait, justifiait même, sa brusque poussée d’autoritarisme glaciale et réflexe.

Crassius observa alors Théo verser du Tomberlin sur une compresse de tissus. Le précieux alcool, cuvée rare vieillie au fût cerclé de Lyrium, imbiba mollement le tissu. D’une seule main le jeune soignant referma la bouteille et la déposa au sol avant de venir tamponner les deux plaies de son patient de cette compresse hors de prix. Son jeune visage était chiffonné, comme perturbé, piqué au vif par quelque chose dans les paroles de Crassius. Théo était-il offusqué de se voir ainsi offrir une porte de sortie ? Ses mots, polis mais fermes, ne laissaient plus aucun doute à ce sujet.

Alors que Théo s’occupait des poignets de son ami, Crassius songea au suicide. Certes, les poignets entaillés d’Ulio pouvaient y faire songer, tout comme les cicatrices translucides qui les marquaient déjà en plusieurs endroits. Mais qui connaissait Ulio ne pouvait croire en une telle hypothèse. Ce type n’avait rien à envier aux géants, que leur appétit insatiable poussait à ravager Tevinter et une grande partie du Sud de Thédas. Personne n’était plus vivant que lui, il devait tout obtenir, tout gouter, tout posséder avant tout le monde. Sa vie n’était qu’une épuisante course en avant, qu’une éreintante compétition dont il s’abreuvait avec sauvagerie. Mais avec une indéniable classe aussi. On pouvait facilement aduler Ulio, ou profondément le repousser. Lui-même avait choisi de s’adorer. Et pourtant, cette nuit, dans cette éternelle course au pouvoir, il avait bien faillit se détruire.

Crassius reporta son regard perçant sur le jeune soignant, qui évoquait à présent une possible punition. Il fronça les sourcils : lui avait eu la chance de grandir dans l’indifférence la plus totale de ses deux parents, trop occupés à fonder tous leurs maigres espoirs en son frère aîné. Il avait donc joui d’une invraisemblable liberté, et n’avait jamais reçu la moindre punition. Les punitions n’étaient-elles d’ailleurs pas réservées aux esclaves ? Aux domestiques ou aux enfants ?

Enfin, Théo conclus : s’il ne connaissait pas la vérité se dissimulant maladroitement derrière les blessures d’Ulio, il s’en porterait pour le mieux. Crassius hocha gravement la tête : voilà qui était bien pensé. Il clôt alors définitivement l’idée même d’une porte de sortie. Théo, de toute manière, avait l’air déterminé :
“Je les soigne. Tous, sans exceptions.„


Que sa dévotion était noble à voir. Les gestes assurés du soignant traçaient une sorte de ballet autour du corps livide du malade. Un ballet aux pas précautionneux mais mécaniques. Les gestes d’un expert. Mais alors le jeune Théo fit un faux pas. Il déposa la compresse, maintenant imbibée d’un sang mêlé de Tomberlin à même le drap couvrant le somptueux lit d’Ulio. Un couvre-lit cousu de véritable fils d’or et dont, selon ses dires, la création avait nécessité plus de deux mois complets à une équipe de couseuses Nevarennes. Une merveille qu’il s’était offert à l’occasion de son mariage. Le jour maudit où Hécate devint sa femme.

Insensible aux tourments subis par ce pauvre couvre-lit, Théo s’empara d’un nouveau bocal, contenant cette fois-ci une sève claire et souple, probablement de l’elfidée. Il en fit délicatement couler sur les plaies d’Ulio. Le ballet des gestes maîtrisés du jeune Théo ne s’arrêtaient pas. Couche après couche, soin après soin, il s’attelait avec le plus grand sérieux à la guérison de ses plaies. D’une voix neutre et concentrée, il énuméra de nombreux conseils, ordonnance d’une bonne guérison. Manger de la viande, du poisson et des légumes. Arrêter le thé, le café… L’alcool ?

Crassius ne put retenir son rire. Imaginer Ulio sobre lui était quasiment impossible. Cette chambre et ses mille trésors alcoolisés en témoignaient largement.
Sobre, le géant en lui laisserait alors éclater toute sa sauvagerie bestiale, il n'y aurait alors plus rien de charmant en lui. Sobre, il perdrait certainement ce brin d'accent qui ralentissait ses phrases, cette langueur paresseuse qui alongeait ses gestes. Sobre ou mort. Sobre ou pâle et inconscient. Le choix semblait impossible. Indifférent aux gourmands que ses recommandations avaient provoqués, Théo rangea son bocal de sève d'elfidée et continua son ballet, emplissant un sachet de nombreuses plantes que Crassius, bien trop perturbé, ne reconnu pas. Il était trop distrait, comme extérieur à présent à ce ballet trop long. Pourtant il tends la main et se saisit du sachet, des plantes qu'il ne reconnaît pas, et accueille le nouveau conseil d'un vague mouvement de tête.

Mais Théo n'en avait toujours pas fini. Habitué des mages de soins, Crassius réalisait à peine à quel point se devait être dur pour les soporati d'accéder à des soins. Étant membre de l'Académie de Minrathie, Crassius avait accès aux services de ses collègues. Ses plaies étaient refermées en moins de temps qu'il n'en fallait pour dérouler une bande de tissus. Et lorsqu'il était sur le terrain, Crassius évitait au maximum de se blesser. Il possédait une solide constitution qui lui permettait toujours de s'en sortir, et devant les soins que recevait Ulio, il s'en ressentait chanceux.
“Je te montre comment faire ?„
"Je crains que ça ne soit inutile Théo. Je ne serais pas celui qui prendra en charge la guérison d’Ulio. Il vaudrait mieux pour moi que je ne sois plus là lorsqu'il reprendra connaissance.„


Tristement, Crassius promena son regard sur l'entièreté de la pièce, lourdement conscient d'y mettre les pieds pour la dernière fois. Voulant au plus vite oublier cette désagréable sensation de page à tourner, le mage s'efforça à se concentrer de nouveau sur le présent, sur l'hôte poli et serviable qu'il avait fait venir.
“Mais dis-moi Théo, où as-tu trouvé toutes ces plantes et ces préparations ? Comment t'es tu formé à l'écart des soins ?„



Lun 8 Fév 2021 - 20:19

Théodore Camillus
Théodore Camillus

 

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Un passage en quartier Laetan
feat. Crassius Servis
9:38, 6 Réalduc

Ayant finit de panser les plaies du patient, Théo se leva, regardant Crassius droit dans ses yeux – ou du moins essaya, l’homme était tellement grand. Théo le regarda ainsi un moment en silence, avant de soupirer et de détourner le regard. Si même l’homme aux doudous ne comprenait pas… Qui comprendrait Théo ? D’une certaine manière, Jehan comprenait. Mais Jehan était Jehan, l’exception qui confirmait la règle.  
N’est-ce pas cette même Chantrie qui dit que la magie doit servir le plus grand bien ? En suivant cette logique, les mages doivent donc mettre leur magie au service du plus grand bien. Aider les malades, les pauvres, les affamés… Ils devraient pouvoir le faire. Si les mages d’ici ne peuvent pas faire cela, qu’est-ce qui m’empêchent de prendre leur relais ? Je ne suis pas mage, mais ce que je fais, du point de vue des Soporatis, est sans doute magique. C’est ma manière à moi de faire de la magie.
A Minrathie, la capitale du pays où gouvernait pourtant les mages, la magie était un sans doute un mystère pour une grande partie de la population. Si n’importe quel Soporati pourrait en reconnaitre son utilisation – comme cette fois, le jour de sa rencontre avec Crassius, où la jolie dame l’avait immobilisé surplace alors qu’il essayait de s’enfuir –, ces mêmes Soporatis ne pourraient en aucun cas la comprendre comme le faisait les mages. Ces mages, comprenaient-ils même ce pouvoir qu’ils utilisaient ? Sans doute pas entièrement. La magie était incompréhensible, voilà la définition qu’en donnait Théo.
Pour eux, je fais de la magie, car ils ne comprennent pas pourquoi je les soigne. De manière générale, tout ce qui ne peut être compris de fond en comble relève de la magie. Si le terme « magie » a une définition aussi vaste, le terme « mage » a une définition tout aussi large.
Théo prit soudain conscience qu’il s’aventurait sur un terrain glissant, voir dangereux. Il tourna la tête vers Crassius pour observer sa réaction. Pouvait-il continuer dans son raisonnement, ou devait-il simplement détourner délicatement le sujet ? Ah, s’il ne répondait pas non plus à la question sous-jacente, c’est-à-dire au « pourquoi l’apothicarerie et la médecine t’intéresse autant »… Apparemment, la mention des livres et de ses parents apothicaires n’étaient pas suffisant, mais que dire de plus ? Le regard de Théo se perdit à la contemplation du mur juste en face de lui.
Là-haut, il est clair que personne n’aide le monde à aller mieux. Alors j’essaye, à ma façon, d’aider le monde à guérir, même si cela n’aide pas vraiment.
Théo avait « Là-haut » en pointant sa main négligemment sa main vers le ciel. Cela désignait autant le Créateur que le Magisterium et le système qui dirigeait Tevinter. Et si Théo ne se trouvait pas à Tévinter, mais ailleurs en Thédas, alors cela désignerait le système politique en place dans ce lieu précis. La politique… Voilà pourquoi il n’aimait pas ce domaine. Toujours à préférer ses propres intérêts au bien commun. Des promesses qui n’en sont pas vraiment… Théo en avait que très peu vu de ce monde, mais il en avait déjà que trop constaté l’incompétence de ces gens censés participer à l’intérêt de toute un peuple. Quelle était la logique derrière le fait d’abandonner les Soporatis dans la misère ?
Les Soporatis forment d’ailleurs la majeure partie de la population tévintide. Ils ne sont peut-être rien, vu d’en haut, mais sans eux, comment le système actuel peut-il fonctionner ? Ce n’est pas ta mère, ni la mienne, qui va aller travailler dans les champs pour nous nourrir.
Et justement, Crassius s’était demandé quel était le pire cas que Théo avait rencontré. Il sourit tristement, presque désabusé. Ses yeux se tournèrent vers la fenêtre. Crassius était-il déjà allé dans le quartier Soporati ? Ou n’avait-il juste pas fait attention ? Il y avait là-bas, dans les ruelles sombres et dans les maisons, des cadavres. Ou presque des cadavres, puisqu’en bonne voie pour le devenir.
Je peux soigner les petits maux. Pour les plus grands, je ne peux que soulager, et prier pour que la maladie n’emporte pas le patient : j’ai une chance sur deux de le voir en vie après ma première visite. Parmi ces derniers, le pire cas que j’ai rencontré ? C’est difficile à dire. Sans doute la fois où je suis venu et que le patient était déjà mort, mais les « vrais mages » spécialisés dans la guérison doivent avoir un taux de réussite beaucoup plus élevé que moi. Ils pourraient éviter beaucoup de morts. Pourquoi ne soignent-ils pas ceux qui en ont le plus besoin ?
Théo en avait définitivement trop dit. Même Jehan n’en savait pas autant sur ce qu’il pensait du sujet abordé en ce moment. Il ramassa la bouteille d’alcool, puis la tendit à Crassius.
Merci pour la bouteille. Et si tu veux que ton ami vive, prie le Créateur, et confisques toutes les bouteilles et tonneaux d’alcool, de thé et de café, le temps de son rétablissement. Ce n’est pas une option, d’accord ?

Jeu 18 Fév 2021 - 17:12

Anonymous
Invité

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Un passage en quartier Laetan.



Abasourdis devant la réaction de Théo, Crassius ne put s'empêcher d'esquisser un pas respectueux en arrière. Par une simple remarque, le mage semblait avoir lancé une machine complexe à laquelle il ne devait pas exister de bouton d'arrêt. Il se prenait chaque nouvelle réflexion, chaque doute du jeune homme de plein fouet comme il se serait pris un vent violent un jour de tempête.
Politique, pouvoir, altruisme, religion, tant de vastes sujets furent évoqués en seulement quelques phrases. Et Crassius les reçut tels des claques. Il ne se reconnaissait dans aucun de ces concepts et pourtant n'était-il pas bel et bien un citoyen pleinement conscient du monde que décriait Théo ?

Oui, par un mécanisme complexe et obscur, l'immatériel s'était en quelque sorte lié au destin de Crassius dès sa conception, le dotant de magie, ce précieux sésame pour une vie meilleure. Oui, ce bienheureux accident lui avait évité de connaitre la misère des soporatis, ces citoyens interchangeables qui peuplaient les rues de la belle Minratie. Mais que pouvait-on dire de plus ? La magie définissait-elle réellement l'être qu'il était devenu ?

Non, certainement pas.
Tout ceci n'était qu'une vilaine propagande Chantriste. Certains Hommes étaient faits pour aider, d'autres non. Ce n'était pas plus compliqué que cela. Magie ou non, un Homme ne pouvait pas aller à l'encontre de ses instincts. Il n'était pas une machine, pas un dieu non plus. Interdisait-on aux soporatis de répondre à leurs impulsions premières ? Non. Ils pouvaient s'inventer marchands s'ils le désiraient, ou cuisinier ou encore dresseur de géants. En toute logique il en allait de même pour les mages. Un grand nombre d'entre eux ne s'intéressaient pas aux soins. D'autres encore n'usaient que très rarement de leur magie. C'était d'ailleurs le cas de Crassius qui s'épanouissait plus dans l'archéologie que dans l'immatériel. Son bâton de mage n'était qu'un outil parmi tant d'autres. De par sa taille, il avait accès sans échelle aux plus hauts rayonnages de l'impressionnante bibliothèque du Cercle. Pourtant personne ne s'attendait à ce qu'il y passe ses journées ce n'était pas son travail. Sa taille ne devait pas plus le définir que sa magie.

Malgré tout, Crassius comprenait la réaction de Théo. Le jeune homme s'était construit en opposition par rapport au monde l'entourant. Les Camillus, qui l'avaient élevé, étaient une famille d'Altus tellement repliés sur leurs anciens privilèges qu'ils s'en étaient coupés du monde au point d'en dépérir. En se tournant vers les soporati, Théo fuyait ce destin peu enviable. Il ouvrait à sa manière une porte sur un monde bien plus vaste.
Le visage de Crassius se vida soudainement de toute substance. N'avait-il pas, lui aussi, fait exactement la même chose ? N'avait-il pas fui l'avidité et la pression de ses parents en se développant dans les ombres de la société ? N'était-il pas devenu contrebandier dans l'unique but de se trouver lui-même ? Il balaya ces pensées d'un revers de la main sans réellement trouver une raison suffisante d'y objecter.
Après tout, rien de tout cela n'avait la moindre importance.

Alors, lorsque Théo sembla se reconcentrer sur les soins à donner au malade, Crassius acquiesça gravement.
“Je comprends, et j'accepte tes recommandations. Pourrais-tu m'aider à emporter sur le champ toutes ces terribles tentations ? Je te laisserais les bouteilles, que tu pourras donner ou user à ta guise. Pour le reste, je laisserais un mot à la femme d'Ulio, lui expliquant comment prendre soin de cette pauvre carne.„

Sans plus attendre il se dirigea vers l'un des cabinets à boisson de la pièce, et se mit à entasser les bouteilles dans ses bras, autorisant silencieusement Théo à en faire de même. Bouger lui fit du bien. Cela lui permettait d'oublier ses pensées. D'enterrer ses doutes.



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